se serait-il introduit dans l’intimité des Guise ? Il avait pris part à la campagne d’Allemagne, et l’on sait que Charles-Quint avait été obligé de lever le siège de Metz. François de Lorraine estimait ses capacités militaires, voyait en lui un brillant second. Prit-il ombrage de ses assiduités auprès de la duchesse ? Elles furent assez connues pour que les chroniqueurs n’hésitent pas à qualifier leurs relations. Les chroniqueurs rapportent plus volontiers le mal que le bien : ils sont plus assurés d’être lus et compris. François de Guise, inquiet, aurait chargé Antoine de Bourbon d’une enquête discrète qui l’aurait rassuré. C’est du moins ce que rapporte Mlle Poizat. Mais ce n’est point dans le caractère du duc qui avait accoutumé de traiter personnellement toutes ses affaires. Fut-ce pour détourner ses soupçons, fut-ce par simple amitié pour Nemours, fut-ce pour tenter de vaincre la passion qui l’envahissait, Anne d’Este voulut faire épouser à Jacques de Savoie sa sœur Lucrèce qui l’égalait en beauté. Il y eut même des fiançailles. Nemours s’attarda en Italie. Il avait de bonnes raisons de s’y attarder : Françoise de Rohan, qu’il avait séduite et abandonnée, allait être mère, et il ne se souciait pas de sa paternité. Cependant il revient, mais pour ne faire que traverser Paris et retourner aux camps : le terrible Guise reprenait Calais.
Il ne guerroyait pas avec Guise quand celui-ci fut assassiné. Il se battait alors dans le Dauphiné et le Languedoc contre le fameux baron des Adrets. Mlle Poizat nous peint de la façon la plus romanesque et la plus touchante la rencontre de Nemours et de la duchesse de Guise en deuil, mais, comme elle ne cite pas ses sources, je n’ai pu les vérifier. Qu’il ait été ou non son amant, que le duc de Guise l’ait su ou non, il est certain qu’il l’aimait et qu’il voulait, libre, l’épouser. Elle avait alors trente-deux ans, elle était dans tout l’épanouissement de sa beauté, et par surcroît elle représentait pour l’ambitieux Nemours un magnifique parti : les richesses des Guise étaient considérables, leur puissance dans le royaume combattue, mais sans égale (on le vit bien à la fortune d’Henri de Guise), et Nemours engagé à fond dans leur cause n’en pouvait changer et ne pouvait donc épouser plus haut.
Il y avait deux obstacles à leur mariage, et deux obstacles du même ordre. Chacun d’eux était engagé dans un procès. La duchesse avait éprouvé, de la mort de son mari, une