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AU PAYS DE RABELAIS

II[1]


iii. — la guerre picrocholine

Le jeune Gargantua achevait ses études à Paris, lorsqu’il reçut un jour un laquais de son père, « le Basque. » Ce laquais, — apparemment quelque domestique d’Antoine Rabelais, peut-être celui-là dont Maître François tenait les phrases basques qu’il met dans la bouche de Panurge[2], — c’est lui sans doute qui, sous la Saullaie, le jour de la naissance de Gargantua, réclamait à boire dans la langue de son pays : Lagona edatera ! — et c’est peut-être ce Miquel qui figure au chapitre xxxvii, parmi les serviteurs de Grandgousier. Quoi qu’il en soit, le Basque apportait à Gargantua une lettre de son père, où ce dernier mandait au jeune homme de revenir au plus vite pour le défendre contre les entreprises d’un de ses anciens amis et confédérés, nommé Picrochole.

Depuis longtemps, on sait qui « est » ce Picrochole. Un certain Bouchereau, probablement un magistrat de Chinon, qui vivait à la fin du XVIe siècle ou au début du XVIIe, nous a appris qu’il se nommait « Scevole ou Gaucher, ayeul de Gaucher ou Scevole, grand-père de MM. de Sainte-Marthe, » et qu’il demeurait à Lerné, « beau vilaige, despendant de Fontevraulx, lequel vilaige Madame [l’abbesse de Fontevrault, dont il était le médecin] luy avoit donné sa vie durant, comme elle avoit fait à deulx precedans, cause qu’il [Rabelais] l’appela tiers de ce

  1. Voyez la Revue du 15 novembre.
  2. Livre II, ch. ix.