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que chaque nuit, dans un auto du ministère de la Marine, l’attaché naval allemand, accompagné d’officiers grecs, vient explorer certains points de la baie d’Eleusis ; il s’agit sans doute d’installer des repères optiques en vue d’un raid de zeppelins sur l’escadre, et c’est suffisant pour justifier la proposition de l’attaché naval anglais, dont le service des renseignements anglo-français a reconnu l’utilité. »

Mais pour qu’elle fût mise à l’étude et résolue au mieux des intérêts de la France, il eût fallu que le gouvernement français renonçât à subordonner toutes ses décisions à une entente absolue et complète avec ses alliés, surtout dans les questions où il était seul intéressé. Il y avait dans cette subordination une cause d’embarras qu’il eût été facile de supprimer en laissant la politique française poursuivre seule son objectif, quitte à demander à l’Angleterre, à la Russie et à l’Italie si elles s’associaient aux décisions de la France. C’était l’avis des Français d’Athènes. Il serait impossible d’arriver à un résultat, si l’on continuait à essayer de se mettre d’accord avant de prendre une décision et avant d’agir. Il n’y avait aucun incident à craindre d’un changement de système. Mais il fallait se décider à déplaire au Roi, et c’est parce qu’on s’était toujours arrêté à ce point, que la situation avait toujours empiré depuis un an.

Maintenant le gouvernement grec, en dépit du bureau commercial anglais, violait tous ses engagements, et en tout il payait d’audace. Il réquisitionnait le charbon, le faisait transporter par chemin de fer en Thessalie ; il concentrait subrepticement des troupes et du matériel ainsi que des stocks de toute espèce suivant le procédé employé à Cavalla, comme si le Roi voulait renouveler la trahison de la Macédoine orientale et livrer aux Bulgares cette province pleine d’approvisionnements, dans le cas où ceux-ci, aidés de l’Allemagne, refouleraient l’aile gauche de l’armée d’Orient. « C’est le but que poursuit le Roi ; il répète partout que les Allemands vont raccourcir leur front français pour libérer une grande partie des troupes qui pourront alors écraser la Roumanie et jeter à la mer l’armée d’Orient. » Il n’y avait donc plus à hésiter, car le péril résultant de l’inaction des Alliés grandissait tous les jours. Le 14 octobre, on constate que les réservistes continuent à se réunir envers et contre tous ; les présidents de Ligues tiennent tous les jours des conférences à Athènes. En cette même journée, cinq ou six vénizélistes étaient