Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 61.djvu/299

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tendresse, s’inquiète. Il se sent inerte, sinon endurci, appauvri dans son secret. Il avoue son malaise. Depuis plusieurs années, l’Annuaire catholique du Rhin[1] constate le dépérissement des associations de Sainte-Elisabeth et de Saint-Vincent de Paul, et cherche en vain le moyen de leur redonner de la vie. Elles assuraient la direction et l’organisation de l’effort charitable, de l’élan. Les Rhénans se demandent comment les revivifier. Et dans les derniers congrès de charité, leurs évêques expriment, tous, les mêmes préoccupations et les mêmes plaintes : de quelle manière, au nom de quoi, demeurer en concurrence avec l’assistance publique, quand les organisations catholiques ont tout fait pour ne plus s’en différencier ?


Ainsi, dans le domaine charitable, se joue le même drame que dans le domaine de la légende et de la mémoire historique. Le cœur rhénan souffre de la même manière que l’imagination rhénane. Ici encore, la Prusse donne l’assaut. Comme elle a dénaturé ou étouffé les imaginations du Rhin, elle dessèche les aspirations charitables, les meilleures richesses bienfaisantes de la foi. Et cette action néfaste, si contraire aux dispositions et aux aptitudes des populations rhénanes, nous allons maintenant la voir se manifester dans le domaine social et dans l’activité des classes laborieuses de la vallée du Rhin.

Cependant il s’agit de clore cette leçon et ce trop vaste sujet par une moralité positive. Après avoir parlé des légendes, dans notre dernière leçon, nous avons formulé un vœu précis et proposé une résolution pratique. Aujourd’hui, nous agirons de même. En nous excusant de ce que pourrait avoir d’osé notre initiative auprès du prélat respecté qui nous fait l’honneur de nous écouter[2], nous souhaitons que le lien, brutalement rompu par la défaite de 1870, entre les associations et congrégations charitables de Rhénanie et de France, se rétablisse, et que les belles forces créatrices de la piété française recommencent à répandre leurs bienfaits sur le Rhin. Nous le demandons aux maisons-mères de celles de nos congrégations qui se sont répandues au XIXe siècle là-bas ; nous le demandons aux secrétariats généraux des associations catholiques de charité… On appréciera l’importance qu’aurait cette reprise de

  1. Cf. Kirchliches Handbuch, 1918, 1919, 1920.
  2. Mgr Ruch, l’évêque de Strasbourg, l’ancien aumônier du 20e corps.