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ÉMILE AUGIER
CHEVALIER DE LA BOURGEOISIE


Au physique, un type vaillant :
Nez ironique et bienveillant ;
Le rire large d’Henri Quatre ;
Cils brouillés où l’œil pétillant
Flambe comme un charbon sous l’âtre ;
Je trouve là le Vert Galant,
Français de l’ergot à la tête,
Auquel la chanson a fait fête,
Le roi goguenard et béni…


Quiconque voudra se représenter Emile Augier y réussira en lisant ces versiculets, qui sont un portrait publié en 1860 par le Charivari. Et qui voudra connaître les mœurs de notre bourgeoisie, à la même époque, pourra presque se contenter de les étudier dans le théâtre du même Emile Augier. Peu d’auteurs, en effet, sont aussi représentatifs de leur œuvre et de leur temps. Non seulement Augier est un écrivain de race, mais il est un écrivain de notre race. Par sa mère, il descend d’Eustache de Saint-Pierre, un des bourgeois de Calais, et son père appartenait à une famille bourgeoise de la Drôme. On ne peut être plus synthétiquement Français. Il continue la belle lignée de Montaigne et de Molière. Français, il l’est essentiellement, Gaulois même, c’est-à-dire rassemblant les qualités des hommes nés sur notre sol : santé, bon sens, bonne humeur, courage et loyauté. Son théâtre se rattache directement à celui du grand XVIIe siècle, par-dessus la lacune du XVIIIe, de même que, dans