dont je faisais partie, me presse extrêmement de partir pour le Sahara, aussitôt que vous m’aurez accordé les facultés nécessaires, sans un seul jour de retard, puisqu’un jour d’avance peut être le salut de l’âme de l’un de nos soldats. Aussi je regarde comme un devoir de charité de vous écrire de nouveau, afin de pouvoir partir le plus tôt possible.
« Je demande humblement à Votre Grandeur deux choses : 1° la faculté d’établir, entre Aïn Sefra et le Touat, en l’une des garnisons françaises n’ayant pas de prêtre, un petit oratoire public, avec la sainte réserve pour les besoins des malades, d’y résider et d’y administrer les sacrements ; 2° l’autorisation de m’y adjoindre des compagnons, prêtres ou laïcs, si Jésus m’en envoie, et d’y pratiquer avec eux l’adoration du Très Saint Sacrement exposé.
« Si vous daignez m’accorder cette double demande, je résiderai là, chapelain de cet humble oratoire, sans titre de curé, ni de vicaire, ni d’aumônier, et sans aucune subvention, vivant en moine, suivant la règle de Saint-Augustin, dans la prière, la pauvreté, le travail et la bienfaisance, sans prêcher, sans sortir, si ce n’est pour administrer les Sacrements, silencieux et cloîtré.
«Je promets de tout mon cœur à Votre Grandeur de m’efforcer, avec l’aide de Dieu, de n’être jamais, malgré ma misère, une occasion de scandale, et de ne jamais être, pour votre Délégation, une cause de frais ni de charge matérielle ; je vous promets d’avance, de tout mon cœur, l’amour filial et la plus fidèle obéissance.
« Si Votre Grandeur désire me parler, sur un mot de vous, par poste ou télégraphe, j’irai immédiatement à Alger.
« Je suis avec le plus profond respect, Monseigneur...,
« CHARLES DE FOUCAULD,
« prêtre indigne. »
Il part au début de septembre 1901. Les caisses sont déjà prêtes, clouées, étiquetées, où les Frères ont enfermé les provisions et tous les meubles qu’emportera l’ermite. Que contiennent-elles ? Le nécessaire de la chapelle, un petit nombre de livres, 50 mètres de corde, avec un petit seau pour puiser de l’eau dans les puits du désert, de la toile solide pour fabriquer une tente, et des sacs fendus dont on fera des tapis.