France, de s’accommoder avec l’électeur de Saxe. Malgré les menées de l’Electeur, le parti français demeurait puissant en Pologne. Quelques-uns de ses chefs comptaient parmi les palatins ou gouverneurs, qui avaient sous leurs ordres des castellans ou châtelains, et semblaient, dit un contemporain, « autant de rois : on les voyait aller aux diètes avec douze mille hommes à leurs gages, troupes ou domestiques et quatre pièces de canon, dont ils ornaient les avenues de leurs palais. » Le prince de Conti avait notamment pour lui le grand général de Lithuanie, Jean-Casimir Sapieha, palatin de Vilna, dont l’esprit était mince, mais la puissance considérable et les façons royales. Lorsque le prince Sapieha passait dans Varsovie, se rendant à quelque visite de cérémonie, le cortège de cet homme, qui avait à son service une garde où figurait une compagnie de janissaires, remplissait les rues de sa magnificence. Ce prince si fastueux, l’abbé de Polignac se l’était attaché, lui et toute sa famille, pour quatre-vingt mille écus. Malheureusement, le lien était peu solide.
L’électeur de Saxe était un adversaire plus redoutable qu’aucun des princes étrangers qui avaient brigué ou briguaient encore la couronne de Pologne : Pierre, tsar de Moscovie ; Jacques, roi détrôné d’Angleterre ; Don Livio Odescalchi, neveu du pape Innocent XI ; le duc Lorraine, le prince Charles de Neubourg, l’électeur de Brandebourg, l’électeur de Bavière et le prince Louis de Bade. Jacques Sobieski venait de se désister en faveur du prince Charles de Neubourg, mais ses partisans se ralliaient à l’électeur de Saxe. Le parti de Frédéric-Auguste était cependant moins nombreux que celui du prince de Conti. Par malheur, l’argent du roi de France n’arrivait pas, et Conti lui-même ne se hâtait guère d’arriver. L’Electeur au contraire, qui se montrait fort généreux et promettait, avec la conquête de la ville de Kaminieck, tombée au pouvoir des Turcs et très regrettée par les Polonais, dix millions de florins, se tenait sur la frontière, à la tête de ses troupes, décidé à envahir la Pologne au lendemain de l’élection.
LA FORCE.