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Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 63.djvu/776

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L’Empereur fit au grand tragédien plusieurs observations critiques sur la pièce, et lui dit de les communiquer à l’auteur ; il donna même le plan d’une scène et fît voir a Talma quel geste devait faire Tippo et quelle attitude il devait avoir en se levant de son trône, pour aller, je crois, combattre les Anglais ; et, pour imprimer davantage à l’acteur l’action et le langage du souverain de Mysore, l’Empereur s’assit dans un fauteuil et s’en releva avec un geste des plus significatifs, plein de noblesse et de résolution, en articulant quelques mots appropriés à la circonstance (1812 ou 1813).

Sur les six heures et demie, je quittais l’intérieur pour aller au dîner de l’Empereur. Le couvert du dîner, comme celui du déjeuner, se mettait dans le salon des grands officiers. La place de l’Empereur était le dos du côté de la cheminée et l’Impératrice en face. Les personnes de service étaient le préfet du palais, le contrôleur, les deux maîtres d’hôtel, le chef d’office, deux tranchants, et le sommelier, un valet de chambre pour l’Impératrice, et moi pour l’Empereur. Indépendamment, il y avait quatre pages (deux pour l’Empereur et deux pour l’Impératrice) qui se tenaient aux côtés de chaque fauteuil. Ils servaient immédiatement l’Empereur et l’Impératrice. Le Roi de Rome, porté par Mme de Montesquiou accompagnée d’une sous-gouvernante, venait au dessert. Le dîner fini, le chef d’office allait servir le café dans le salon où l’Empereur était déjà rendu. Mon service de table étant terminé, je retournais à l’intérieur.

Tous les dimanches, il y avait dîner de famille. L’Empereur se plaisait à discuter avec le cardinal Fesch, sur différents points théologiques, et il était rare que ses arguments ne missent pas Son Eminence aux abois.

A un dîner de famille, la reine de Naples, la princesse Pauline, la reine d’Espagne, la reine Hortense, Madame-Mère, le cardinal Fesch et peut-être quelques autres encore, étaient à table. L’Empereur venait de recevoir une lettre d’un préfet qui lui donnait connaissance qu’un nommé Geoffrin avait sauvé plusieurs ouvriers d’une houillère qui s’était refermée. La lettre fut donnée à la reine de Naples qui put à peine la déchiffrer. L’Empereur, voyant l’embarras de sa sœur, lui dit : « Passez-la à Hortense, elle va nous lire cela. » Effectivement, la reine de Hollande, tenant la lettre, la lut fort couramment. Cette lettre donnait le détail de tous les incidents qui étaient