le prince de Conti, « qui n’avait pu cacher sa douleur à son départ, ne put empêcher qu’on ne démêlât son contentement extrême. » Les plaintes qu’il fit de l’abbé de Polignac ne contribuèrent sans doute pas à atténuer la sévérité que le Roi témoigna au diplomate.
Polignac n’avait pas osé se présenter devant son maître, sans y avoir été invité. Il attendit à Stettin et reçut l’ordre de se rendre sur la frontière. Un peu plus tard, il fut exilé à son abbaye de Bonport, près de Pont-de-l’Arche.
Il avait montré à Varsovie une habileté extrême, « balancé avec de l’éloquence et des promesses, » suivant l’heureuse expression de Voltaire, « l’or que l’électeur de Saxe prodiguait, » ce qui est un véritable tour de force ; mais il était coupable d’avoir outrepassé ses instructions, agi sans réfléchir que le roi de France, luttant contre la plus redoutable des coalitions, n’avait pas pour souci unique la candidature d’un de ses parents au trône de Pologne. Le Roi en était « pour beaucoup d’argent, » et ce parent avait un « dégoût à la face de toute l’Europe. Voilà, s’écriait Conti, le grand ouvrage de M. l’abbé de Polignac, et cette négociation, qui lui a acquis tant de gloire, et dont je puis dire qu’il n’y a eu que moi qui aie bien jugé. »
Le prince avait trop de bon sens, pour se laisser prendre à l’éclat d’une couronne qu’il ne pouvait garder, n’ayant ni troupes, ni argent, et que probablement il désirait assez peu. On serait injuste de lui faire un crime d’avoir mis un médiocre empressement à la saisir. Sous le règne de ce prince charmant, les Polonais eussent peut-être évité les malheurs qui déchirèrent leur patrie sous celui de Frédéric-Auguste.
Moins prodigue que Polignac, Conti revenait en France avec des sommes importantes. La Gazette d’Amsterdam et Dangeau parlent de plus de huit cent mille livres. Pierre Bauger, trésorier du prince, est autrement précis : soyons-le un peu moins que lui, négligeons les sols et les deniers et disons qu’il remit aux caissiers de l’Hôtel des Monnaies dix-huit mille neuf cent quatre-vingt-seize ducats, soit, en argent français, cent vingt et un mille huit cent quarante et une livres, dont soixante-quinze mille deux cent soixante et une faisaient partie des subsides que le Roi avait accordés pour le voyage. Louis XIV ne voulut pas les reprendre et il en ajouta six cent trente-neuf mille huit cent soixante-dix-sept, afin de dégager les terres vendues en 1696 à