15 heures, le général lance son fameux télégramme : « En avant, partout, à fond ! » Sous ce choc violent, l’Allemand plie et recule ; bientôt sa retraite se généralise. Quand le soir tombe sur le champ de bataille, le 16e corps est maître de Rozelieures et de la crête de la Naquet ; le 15e a atteint Lamath et Blainville. C’est la victoire. Si la cavalerie, exténuée, avait pu entamer la poursuite, si le 20e corps, sur les hauteurs de Flainval, ne s’était pas heurté à la résistance farouche du IIIe corps bavarois tout entier, l’armée du prince Ruprecht, battue au Sud de la Meurthe, coupée au Nord de ses lignes de retraite, aurait pu être anéantie. Le succès remporté, pour être moins complet, n’en est pas moins considérable. La porte de la trouée de Charmes est définitivement fermée ; faussée, l’une des deux pinces de la gigantesque tenaille où, selon la conception de Schlieffen, l’Etat-major de Berlin a rêvé d’enfermer les armées françaises, et son plan d’invasion à demi ruiné. « A aucun prix, ne révélez à nos armées de l’Ouest les échecs de nos armées de l’Est : » ce radiogramme allemand du 27 août, que l’on a intercepté, en dit plus long que tous les commentaires.
L’Allemand est battu ; mais il a su échapper au désastre, et il n’a point perdu toute sa capacité offensive. N’ayant pu forcer la trouée de Charmes, il va essayer d’enfoncer une autre porte, et, par le col de la Chipotte, tacher de s’ouvrir le chemin d’Epinal et de Belfort. Un moment, il croira toucher à son but. Sous ses coups redoublés, la valeureuse et tenace armée Dubail finira par plier ; elle reculera pas à pas ; elle abandonnera même Saint-Dié. Mais l’armée allemande n’en pourra pas déboucher. Les deux voies d’invasion qu’elle a voulu successivement tenter se sont, l’une après l’autre, fermées devant elle.
Pendant ce temps-là, Castelnau, tout à la fois pour soulager l’armée voisine et pour exploiter sa propre victoire, relance ses troupes à l’assaut. Il veut reprendre Gerbéviller et Lunéville. Renforcé de six bataillons qu’il a prélevés sur la garnison de Toul, il remet, le 26, ses trois corps d’armée en mouvement ; mais la lutte est dure, la fatigue extrême, et l’Allemand commence à se terrer : on atteint péniblement en fin de journée la rive gauche de la Mortagne. Dans ces violents combats, un second fils du général, Michel de Castelnau, est grièvement blessé et fait prisonnier. Le lendemain, 27, est consacré au repos et à un regroupement des forces françaises en vue des