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Qu’une réforme fût nécessaire lors de l’avènement du sultan Mahmoud en 1808, c’est ce que reconnaissaient même les Turcs les plus attachés aux anciens usages. Organisé pour la conquête et tirant ses principales ressources de la victoire, l’empire des Osmanlis avait dû se résigner à vivre en subissant défaites sur défaites. Les Etats européens, à la force desquels il ne songeait même pas à résister, entretenaient maintenant des relations actives et suivies avec le Levant. En éveillant de nouvelles idées, en communiquant de nouveaux besoins, leur contact faisait ressortir et rendait plus choquant par la comparaison le despotisme incohérent et désordonné qui régnait dans les possessions ottomanes. Les deux causes principales de ce désordre et de cette anarchie étaient, d’une part, l’abandon ou plutôt l’oubli de la loi religieuse, de la coutume et des règlements qui la complétaient ; d’autre part, l’impuissance de celles des règles encore en vigueur de cette législation, mal servie par ses interprètes ignorants et bornés, à satisfaire les besoins nouvellement nés des relations avec l’Europe. La même nécessité se faisait sentir en Egypte où Mehemet Ali venait de s’emparer du pouvoir. Une fois la nécessité de la réforme admise, deux méthodes s’offraient pour l’accomplir. Restaurer les institutions depuis longtemps déchues et déformées en les transformant dans la mesure que le progrès exigeait, de façon à en tirer une organisation sociale à la fois traditionnelle et moderne apte à rendre le peuple ottoman aussi fort et aussi prospère que ses rivaux chrétiens, tout en lui laissant ce qui le distinguait d’eux. Le plan était séduisant autant qu’irréalisable. Son exécution aurait exigé le concours d’hommes exceptionnellement savants, capables et avisés. Où les aurait-on trouvés ? Elle nécessitait beaucoup de temps. Or le sultan et son vice-roi étaient tous les deux impatients. Ils choisirent l’autre voie qui leur parut plus claire, plus accessible, plus sûre, en tous cas, plus rapide. Ils empruntèrent à l’Europe ou plutôt à la France, certaines de ses institutions et copièrent partiellement son organisation. C’est sur son modèle que l’armée, l’administration et la législation turques et égyptiennes ont été transformées.

En Turquie furent promulgués successivement de 1850 à 1864 un code de commerce, un règlement sur la compétence et l’organisation des tribunaux de commerce, des codes de procédure commerciale et de commerce maritime, de nombreuses