Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 65.djvu/236

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

partie du Conseil de la Société, ils siègent à l’assemblée ; ce sont, à vrai dire, des États indépendants, des nations libres, qui ne sont plus guère rattachées à la vieille Angleterre que par des liens moraux et qui vivent chacune de sa vie propre.

Les premiers ministres des Dominions, responsables devant leurs Parlements respectifs, ont le plus grand respect pour la Couronne et pour les Gouverneurs qui la représentent à Ottawa ou à Melbourne, à Capetown ou à Wellington. Mais ils ne reconnaissent naturellement à personne le droit de leur donner des ordres, et l’opinion dont ils dépendent est, à cet égard, aussi chatouilleuse qu’ils le sont eux-mêmes. Lorsque, le 20 juin dernier, a commencé, à Londres, la Conférence qui vient de se terminer ce mois-ci, le bruit a couru dans les Dominions que leurs premiers ministres étaient appelés en Europe pour y recevoir de l’Angleterre un système tout fait de gouvernement central, portant atteinte à la liberté des peuples associés. Le Canada et l’Australie se sont, tous deux, très vivement émus de cette nouvelle, dont les événements ont démontré la fausseté, mais que l’inquiète susceptibilité des intérêts avait vite répandue partout. L’Angleterre se garderait bien, d’ailleurs, de chercher à imposer aux Dominions une direction dont ils ne veulent pas. Depuis la fin du XVIIIe siècle, elle est hantée par la peur que l’exemple des États-Unis ne devienne contagieux, et elle ne peut être qu’à demi rassurée sur les destinées de l’Empire, lorsqu’elle entend le très remarquable premier ministre d’Australie, M. W. M. Hughes, s’écrier : « Je suis sûr d’exprimer la pensée des Australiens en déclarant que l’Amérique occupe une bonne place dans leurs cœurs ardents. Ils voient dans l’Amérique d’aujourd’hui ce qu’ils espèrent être dans l’avenir. » L’Angleterre a donc lâché toute la corde qu’il a fallu et les premiers ministres ont délibéré à Londres sur un pied d’égalité avec M. Lloyd George. C’est encore M. W. M. Hughes qui l’a dit : « Notre rôle dans le Conseil de l’Empire doit être substantiel dans toutes les questions de politique étrangère ; ce ne doit pas être une ombre, mais une réalité. » Aussi bien, la Conférence a-t-elle duré six semaines, tenu trente-quatre assemblées plénières, onze réunions officieuses et huit séances de comités à l’Office colonial. Elle a délibéré sur tous les problèmes internationaux, sur la Haute-Silésie, sur le Pacifique, sur le désarmement naval, sur la Ligue des Nations, sur l’Égypte, sur la défense impériale, sur les communications aériennes, navales, télégraphiques, téléphoniques, entre les diverses parties de l’Empire, sur les réparations, sur une multitude d’autres sujets. Elle s’est, en