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Ce n’est pas seulement pour s’opposer aux réparations et au désarmement que les pangermanistes utilisent à profusion leurs toxines. Ils poursuivent le même travail d’empoisonnement à propos de l’Alsace et de la Lorraine. Tout récemment, dans le Roter Tag, M. Pauli, ancien président de Basse-Alsace, donnait effrontément les raisons pour lesquelles, d’après lui, l’Allemagne ne doit ni ne peut renoncer aux provinces qu’elle a été forcée de nous rendre. Il se flattait d’avoir dit à l’officier français qui l’avait destitué au lendemain de l’armistice : « Vous vous méprenez sur le sens des manifestations qui vous accueillent en Alsace. Si nous avions été vainqueurs, ces gens nous auraient reçus avec le même enthousiasme. Ils sont simplement satisfaits que la guerre soit finie. » Et, en répétant ce sot et outrageant propos, M. Pauli ne comprend même pas dans quelle ignorance de l’âme alsacienne l’ont laissé les fonctions qu’il a exercées. Il écrit cyniquement des phrases comme celle-ci : « On jugera avec sévérité la France qui a pu voler l’Alsace-Lorraine à l’Allemagne. Le fruit mûrira ; le destin s’accomplira inexorablement, contre la France et son impérialisme. » Voilà comment la fraction la plus hardie et la plus active de l’opinion allemande prend son parti du Traité de Versailles et nous témoigne sa reconnaissance de nos concessions renouvelées.

Pendant ce temps, malgré tout l’étalage de sa pauvreté, l’Allemagne industrielle, commerçante, financière, agricole, se reconstitue fiévreusement, comme pour être plus sûre de secouer, le moment venu, les obligations qui lui pèsent. Il suffit de consulter les bilans des banques pour se rendre compte de la confiance qu’a l’Allemagne en son prochain relèvement. La Dresdner Bank avoue que, l’année dernière, le pays a regagné le temps perdu pour la remise en marche des industries et des entreprises de communication. La Commerz und Privat Bank reconnaît que le rendement général du travail est aujourd’hui supérieur à ce qu’il était l’an passé. La Mittldeutsche Creditbank constate que le commerce extérieur va sans cesse en s’améliorant et que les importations des produits de première nécessité, des matières premières nécessaires à l’industrie, et, notamment, du coton américain, se sont accrues dans des proportions très satisfaisantes. Cet optimisme des comptes rendus des banques s’explique d’autant plus que ces établissements sont entrés eux-mêmes dans une période d’extraordinaire prospérité. Leurs transactions ont doublé depuis une douzaine de mois ; elles ont décuplé par rapport aux années qui ont immédiatement précédé la guerre. Les dépôts, qui