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Gouvernements alliés vis-à-vis de l’Allemagne. Tous les publicistes qui ont examiné l’article sans parti pris et de sang-froid, que ce fût M. Gauvain ou M. Gustave Hervé, que ce fût l’amiral Degouy ou Pertinax, ont bien voulu déclarer mon raisonnement irréfutable. Je ne puis donc pas avoir l’illusion que nous trouvions jamais dans cette rédaction malencontreuse une arme contre l’indifférence de nos alliés ou un moyen pratique de nous passer d’eux. Il serait, en tout cas, extrêmement périlleux de livrer cette difficulté à l’avenir.

En revanche, ce qui nous donne, dès aujourd’hui, contre l’Allemagne, une force réelle, c’est que le même article 129 subordonne expressément l’évacuation des trois zones occupées à l’observation fidèle des conditions du traité. Nous voici au 15 octobre 1921. L’Allemagne n’a pas désarmé. Aux termes de l’article 160, c’est à dater du 31 mars 1920 que l’armée allemande aurait dû ne plus comprendre que sept divisions d’infanterie et trois divisions de cavalerie. Aux termes de l’article 162, le nombre des gendarmes et des employés et fonctionnaires des polices locales ou municipales ne pouvait être augmenté que dans une proportion correspondant aux augmentations constatées depuis 1913 dans la population des localités qui les emploient. Aucune de ces prescriptions n’a été respectée. Lorsque le Conseil suprême, soit à Rapallo, soit à Hythe, soit à Spa, soit à Londres, soit à Paris, a déchiré quelques morceaux du Traité et octroyé des faveurs à l’Allemagne, il n’a pas réussi une seule fois à faire prévaloir les volontés qu’il avait exprimées pour le chiffre des effectifs et pour les échéances. Le Reich est donc en révolte continuelle, non seulement contre le Traité, mais contre les protocoles édulcorés qui l’ont suivi. Comment pourrions-nous admettre, dès lors, que les délais d’évacuation eussent commencé à courir ? Successivement, MM. Millerand, Leygues et Briand ont proclamé qu’en effet, ces délais ne couraient point. Mais le Gouvernement de Berlin a protesté et le cabinet de Londres s’est tu. Devant l’effronterie prolongée de la résistance au désarmement, nos alliés continueront-ils à garder le silence ? Ils ont, je pense, autant d’intérêt que nous à empêcher le recommencement de la guerre. Ils savent maintenant ce qu’eût fait l’Allemagne, si elle eût été victorieuse ; et si beaucoup d’entre eux sont impatients de nous voir quitter Mayence et Coblentz, il n’en est pas, je suppose, qui désirent que les Allemands s’installent, avec de nouvelles Berthas, à Anvers et à Calais.

Mais ce n’est pas seulement dans l’obstination que met le Reich à conserver des armées déguisées que se révèle, de plus en plus