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joué autant à la Bourse que maintenant. Et ce sont les fabricants qui jouent le plus. Ne gagnant pas ce qu’ils voudraient en vendant leurs produits, ils tâchent de faire des profits supplémentaires en spéculant sur les valeurs. C’est une maladie.

Les banquiers font naturellement de gros bénéfices. Nous avions déjà constaté que les banques, dès 1919, étaient parvenues à de brillants résultats. Les rapports concernant l’année 1920 sont autrement significatifs. Toutes les grandes banques ont vu leur activité s’accroître et, chose importante à noter, elles reçoivent de l’étranger des sommes considérables : on spécule à la hausse. La Berliner Handelsgesellschaft a reçu ainsi à elle seule, en 1920, près d’un milliard de marks. Nous pouvons certifier que la plupart des banques font de gros bénéfices sur les opérations de change, car elles prélèvent de fortes commissions. Elles font aussi beaucoup d’avances sur marchandises, dans des conditions très rémunératrices.

On dit bien que le volume des transactions est la conséquence de l’inflation. Ce phénomène économique, qui gêne évidemment beaucoup d’industries, ne suffit pas à expliquer les différences qui existent entre les chiffres de 1919 et ceux de 1920. Nous pouvons affirmer qu’en dépit de l’inflation, il y a eu une reprise des affaires, qui a laissé à des catégories nombreuses de personnes de gros profits. L’accroissement des dépenses prouve que la prospérité révélée par certains bilans n’est pas une pure illusion. Il n’y a pas que des Schieber et des mercantis dans les lieux de plaisir, les hôtels et les théâtres, les cafés, les restaurants et les cinémas. « Les caisses d’épargne, écrit Maximilien Harden, sont archipleines et personne, ajoute-t-il, ne sait ce qui est amoncelé dans les armoires, les bahuts et les cachettes de la campagne. » Pour ne pas être forcées de distribuer des dividendes correspondant à la dévalorisation de l’argent, les banques et les sociétés industrielles dissimulent leurs réserves et inscrivent à leur bilan, en les évaluant en marks-papier, des quantités de machines et d’outils. D’autres donnent ou bien des sommes fantastiques sous forme d’actions nouvelles émises à bas prix, ou bien d’énormes primes aux actionnaires[1]. Les banques, avoue de son côté la revue Die Bank, réalisent de

  1. Die Zukunft, 16 juin 1921.