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le monde ; il y a place en Cochinchine et au Tonkin pour la Banque de l’Indo-Chine et pour la Banque Industrielle de Chine. Il y aurait même place pour d’autres banques ! »

Si la Banque Industrielle a traversé la crise que l’on sait, c’est que sa direction, à Paris, a perdu de vue les principes qui avaient présidé à sa fondation : au lieu de suivre la route toute tracée où levait la moisson semée à l’origine, elle a voulu s’engager dans des affaires tout à fait étrangères à son but. Les dépôts et les bénéfices récoltés de Singapore à Yokohama ont été ainsi immobilisés dans des affaires purement métropolitaines, où ils ont été partie engloutis, partie compromis. Mais l’organisme créé en Chine et en Indo-Chine est demeuré sain ; il conserve ses moyens d’action, la sympathie de son ancienne clientèle, l’appui des administrations françaises et chinoises.

Aussi, la conviction du Maréchal est-elle formelle : la France, en accordant à la Banque l’appui qui lui est nécessaire, ne fera que défendre ses intérêts bien compris, tandis qu’en la laissant tomber, elle compromettrait gravement son renom et sa gloire, car, qu’on le veuille ou non, la Banque industrielle de Chine est aux yeux de tous les Orientaux, devenue : « The French Bank, » la Banque française.

Souhaitons que ce soit compris, ces jours-ci, à Paris !


4 mars.

La venue de Joffre était attendue avec impatience à Tien-Tsin où de grands préparatifs avaient été faits pour le recevoir.

Ayant quitté Pékin ce matin par train spécial, le Maréchal arrivait vers dix heures. Par les rues des concessions, bordées de jolies maisons, il est conduit au Recreation Ground, où doit avoir lieu la revue des troupes alliées. Accompagné du colonel Pasquier, commandant le Corps Français d’occupation, il passe devant elles, et remet quelques décorations ; puis le défilé commence. Les Américains d’abord, stricts et rigides, dans des uniformes tout neufs ; la compagnie anglaise de siks, l’arme à la main, farouches, suivant un gigantesque joueur de grosse caisse à demi couvert d’une peau de tigre et jonglant avec ses tampons ; les quatre compagnies franco-annamites encadrant le fier drapeau du 16e colonial, souples, élastiques ; les Japonais frappant le sol à chaque pas, piaffant ; la police chinoise, correcte, gantée de blanc ; enfin, notre glorieux 75. Et toujours