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REVUE LITTÉRAIRE

« LA NEF, » DE M. ÉLÉMIR BOURGES [1]

Il y aura bientôt quarante ans que M. Élémir Bourges a publié son premier ouvrage ; et, depuis lors, il n’a donné que trois volumes. C’est l’une des singularités de cet écrivain, cette rareté qui ne vient pas du tout de paresse et vient d’un sentiment mêlé, je crois, de bel orgueil et de modestie. Paresse ? non : chacun de ses romans, puis la Nef récente, suppose de longues recherches, l’étude exacte d’une époque et de plusieurs pays, une patiente méditation. La modestie est de ne pas attribuer aux lecteurs la curiosité des moindres idées que l’on improvise ; et, l’orgueil, de compter qu’on saura se faire entendre vite et en peu de mots : cet orgueil, ou le dédain qui en résulte ou le compense.

M. Élémir Bourges ne paraît pas avoir eu aucun souci de célébrité. Il a obtenu, sans la désirer peut-être, une sorte de gloire, et qui n’est pas très étendue. Ses admirateurs, qui ne sont pas très nombreux et ne sont pas ce qu’on appelle le grand public, le mettent à une place où ils n’accueillent pas et d’où ils chassent nos romanciers les plus fameux ; ils l’y mettent tout seul.

La solitude sied à l’auteur de la Nef, l’un des écrivains contemporains le plus séparés de la foule, des coteries et de la mode, le plus retirés dans leur travail et leur pensée. Vous lirez, de lui, quatre volumes, s’il vous plaît. Voilà les quatre témoignages qu’il y ait de sa présence, de sa besogne, de ses opinions, de sa rêverie.

N’attendez pas de confidences. Mais vous en demandez ? Le crépuscule

  1. A la librairie Stock. La première partie de la Nef avait paru, chez le même éditeur, en 1904. Du même auteur, Sous la hache (Fayard) ; Le crépuscule des dieux (Work) ; Les oiseaux s’envolent et les fleurs tombent (Plon).