reconquise, l’homme du devoir. Nous entendrons alors des déclarations qu’on ne peut lire sans une sympathie mêlée de respect, car l’humilité, le repentir, la franchise avec soi-même, la sincérité poussée jusqu’à l’héroïsme du sacrifice, s’y font tour à tour entendre. Il est peut-être plus difficile de rentrer dans le devoir que de s’y tenir. Rétracter le serment était plus malaisé que ne l’avoir pas prêté. Dans le Nord, un curé jureur répondait aux reproches d’un ami : « J’ai su faire un pli à ma conscience, il s’y est formé un calus et je vais mon train. » Il n’y avait rien à attendre de cette conscience cautérisée, comme dit saint Paul. Dans le Maine, un prêtre constitutionnel fait cette déclaration : « Depuis mon serment, je ne consacre plus. » C’était mieux. C’était déjà l’éveil du remords, l’abstention des fonctions saintes qu’on ne pouvait exercer sans profanation. Un pas de plus et ce sera le retour à la règle, à l’honneur et à la paix. Ce pas, tous les rétractés le font, tantôt par un retour prompt, irrésistible, tantôt après des luttes, des hésitations que finit par vaincre la conscience encouragée, aiguillonnée par les instances des défenseurs de l’unité catholique, de la fidélité au pape et à l’épiscopat.
Les déclarations recueillies nous font assister à des drames intimes, à des victoires disputées, mais enfin gagnées par la conscience que les intéressés se plaisent à évoquer. Le curé de Saint-Rémy-sur-Bussy rétracte son serment dans cet aveu adressé au procureur syndic : « Ma conscience est un bourreau qui me suit partout et ne me donne pas un moment de relâche. Aussi vous pouvez me faire remplacer. Quant aux cent écus que j’ai reçus en assignats pour le quartier du mois d’avril, je vous ferai passer ce que je n’ai pas gagné. » Au diocèse d’Amiens, le vicaire de Flixecourt, dans une lettre au maire, déclare se rétracter pour satisfaire aux cris de sa conscience « qui me reproche continuellement, dit-il, le fatal serment où j’ai eu le malheur de me laisser entraîner... Mon âme est bourrelée par l’énormité de ce parjure, et quoi qu’il m’en coûte, il faut que je le rétracte comme je fais par cet acte. » Dans le canton de Lignières-Chatelain, un autre vicaire fait cet aveu : « Les remords de ma conscience ne me permettent pas de rester plus longtemps rebelle à sa voix. J’ai une âme, je la dois à Dieu et à la religion : je dois la sauvegarder. Ne le pouvant hors de la véritable Église, de laquelle je me suis séparé, je