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pas crus ! Que d’agitation ! que de bavardages ! Comme il passionne l’Italie, et comme il passionne le monde, ce problème reste sans solution depuis un demi-siècle ! On a tant et tant écrit à son propos, depuis la guerre, que la Consulta a réuni dans une brochure spéciale les différents avis que la presse italienne et la presse étrangère ont exprimés : nouveau dossier versé à cet interminable débat. La publication n’est pas officielle, mais officieuse seulement ; je ne pense pas qu’elle soit tout à fait désintéressée.

A en croire les prophètes qui vaticinent dans les salles de rédaction, ou devant les tables du café Aragno, les temps sont révolus, et le Pape n’attendrait qu’une occasion propice pour franchir les portes de bronze. A vrai dire, ces mêmes prophètes ont annoncé, aussi, plusieurs occasions propices, qui n’ont pas vu se produire l’événement prédit : ce qui prouve que pour garder en ces matières quelque crédit, il vaut mieux s’en tenir aux généralités. Pour moi, qui ne fais pas métier de savoir l’avenir, et qui me contente de noter ici les mouvements d’opinion, à mesure que je les discerne ou qu’on veut bien me les montrer, sans prendre parti, je remarque :

En premier lieu, une diminution du nombre des irréductibles, des gens qui considéraient que le Quirinal aurait commis une véritable trahison s’il avait consenti à établir avec le Vatican quelque rapport que ce fut. La génération qui a fait le Risorgimento est désormais éteinte, ou peu s’en faut ; elle ne compte plus que quelques représentants tout chargés d’années, qui s’inclinent vers le sol. Derrière les cortèges patriotiques, ou voit encore quelques vieux garibaldiens à chemise rouge ; mais ce sont des reliques du passé ; le rouge n’est plus à la mode, la mode est aux chemises noires des fascistes. Certes, les adversaires du Vatican ne désarment pas ; mais leur travail reste obscur, secret ; et, sur l’opinion du moment, de peu de pouvoir.

Le désir d’un rapprochement est favorisé, en second lieu, par des considérations pratiques. En fait, le règlement des affaires courantes entraîne entre Gouvernement et Papauté d’incessantes relations. Elles seraient plus faciles, plus nettes, si on cessait de se livrer au jeu qui consiste à parlementer en feignant de ne se connaître pas. Des sous-secrétaires d’Etat, des ministres ont leurs entrées au Vatican ; et le Vatican les ignore ! Cela devient une fiction diplomatique : autant l’abandonner.