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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 12.djvu/378

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public, finances, ils se « précipitent. » Rien qu’avec les Bossuet, les Mochet, les Humbert, les Bretaigne, on eut fait, vers 1635, un Parlement et une Chambre des Comptes ; et, si l’on y avait joint les Soyrot, les Landrot, les Berbis, les Chantepinot et les Richard, les Rousseau et les Joly, les Simony et les Le Goux, les Barjot et les Drouas, les Beuverand et les Margeret, les Dumay et les Jeannel, on aurait pu fournir à presque toute l’administration d’une province. Or, s’ils pullulent en ces charges, c’est assurément, en premier lieu, que ces formes d’activité flattent le plus l’ambition impérieuse, réalisatrice ou simplement vaniteuse ; — mais c’est aussi, qu’ils y réussissent, qu’ils ont la clarté et le jugement, la modération et l’initiative, et l’esprit d’exactitude et d’ordre que la besogne administrative réclame.

Ceci frappe encore qu’en cette famille, jusqu’à la génération de Jacques Bénigne, il y a relativement assez peu d’hommes d’église, et, en ce petit nombre de « clercs, » presque point de ces moines où se recrutait alors la partie, sinon la plus vivante, au moins la plus remuante et bruyante de l’Eglise et sa batailleuse avant garde. La foi catholique était alors particulièrement vive en Bourgogne ; et il y a tout lieu de penser que les ancêtres de Bossuet participèrent de l’état d’âme commun de leurs compatriotes et contemporains. Toutefois ils ne s’empressent pas au service de l’Église. Au XVIe siècle, leur zèle catholique ne va pas jusqu’à considérer l’adhésion à la « Sainte Union » comme le plus logique de leurs devoirs. Ils ne se sentent pas, comme leur ardent collègue Brulard [1], « provoqués et aiguillonnés à la défense de la religion. » Ils n’estiment pas que ce « maintien » exige d’eux d’empêcher l’accession au trône d’un prince protestant. Ils ne subordonnent nus leur loyalisme dynastique à leur foi.

Puis, quand, à partir de 1630 environ, la volonté de renaissance et d’offensive qui animait déjà quelques illustres chefs de l’Église française passa chez les laïques, et de Paris en provins grâce à des sociétés hardiment propagandistes, véritables « Ligues » spirituelles [2], ― il ne parait pas qu’à ce mouvement, qui dura une cinquantaine d’années, ils se soient associes avant

  1. Discours à l’ouverture des États de Bourgogne en 1390, cité par G. Chevallier, Bulletin catholique de Dijon (1906).
  2. A. Rébelliau, la Compagnie secrète du Saint-Sacrement.