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y avait trois cents personnes assises et peut-être une soixantaine d’hommes debout qui n’avaient pas trouvé de places.

A trois heures, on est allé à la salle de spectacle, éclairée par des bougies, carrée, et comme elle était fort petite, on a été obligé, à cause de la chaleur, d’enlever des pans de tapisserie, ce qui n’était nullement avantageux aux femmes assises de ce côté, éclairées en même temps par un grand soleil et par les bougies.

La pièce était de circonstance ; on y a dit que, le 2 de mai, la propriétaire du pavillon n’en était que la concierge et que ce jour-là il appartenait à toute la France.

Un acteur, supposé aide de camp de M. le Duc d’Angoulême et envoyé en courrier, a donné le bulletin télégraphique de l’armée d’Espagne que le public n’a su qu’aujourd’hui. Cela a provoqué beaucoup de cris de : « Vive le Roi. »

Après le spectacle, on nous a dit de nous rendre au pavillon dans le salon du Portrait.

Il y avait des chanteurs, des pianos, des harpes et une cantate de M. Désaugiers dont le refrain était : « Voilà le Roi, voilà le Roi. »

A ce refrain du premier couplet, le rideau vert est tombé et l’on a vu le portrait du Roi. On a encore crié : « Vive le Roi ! » enfin tout le monde est sorti pour voir les jardins. Les plantations sont bien nouvelles et cela fait un vilain effet : il n’y a point d’ombre ; le temps était beau, mais la campagne sèche et retardée. En face de la maison était une tente ravissante avec une grande table et des sièges, et le goûter le plus élégant, des glaces de toute espèce ; à six heures un quart, tout le monde est parti. L’ambassadrice d’Angleterre avait sans contredit le plus joli équipage à quatre chevaux.

Tout le pavillon était criblé de drapeaux blancs ; on le trouve généralement trop haut pour la largeur, et il a grand besoin des ailes qu’on doit y ajouter l’année prochaine. On disait beaucoup que son mari se mourait, que peut-être serait-il mort pendant la fête, et alors le Roi pourrait l’épouser.

Mme du Cayla est grande, un peu forte, assez blanche, blonde ; son teint est fort laid et couperosé ; ses traits sont très jolis ; elle est hardie, et fort gracieuse ; on lui parlait souvent à la troisième personne et on lui dit toujours : Mme la comtesse.


Je n’ai eu jusqu’à présent qu’un seul succès de figure, je ne sais si on le trouvera flatteur.