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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/162

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Guerre. Ses traditions guerrières, le vigoureux patriotisme de ses enfants, les gros efforts qu’ils ont su faire, au milieu des plus graves difficultés économiques, pour repousser victorieusement l’invasion et la propagande bolcheviques, nous rendent son amitié et son concours éventuel d’autant plus précieux qu’à la communauté des intérêts se joint pour nous unir une tradition d’amitié chevaleresque et de fraternité militaire.

La France et la Pologne ont besoin de collaborer étroitement dans tous les domaines et sur tous les terrains, dans l’intérêt de l’une comme de l’autre : face à l’Allemagne pour empêcher celle-ci de troubler de nouveau la paix du monde ; face à la Russie, en prévision du jour où l’ordre y reviendra et où il faudra y faire renaître une vie économique normale.

C’est, en effet, une des conditions essentielles du problème russe que l’établissement de bonnes relations entre la Russie et la Pologne. Là encore, nous rencontrerons l’Allemagne en tra- vers de la route de la paix européenne et du progrès humain. Elle veut exploiter la Russie au profit de son impérialisme économique, en attendant que renaisse son impérialisme militaire. Pour y réussir, il faut qu’elle empêche les contacts sympathiques entre Pologne et Russie, qu’elle excite les passions nationales et les vieux antagonismes des deux pays pour rendre toujours précaire la situation de la Pologne, alliée naturelle de la France.

La France peut beaucoup pour empêcher la réussite de ces menées allemandes. Son amitié traditionnelle pour la Pologne ne doit pas lui faire oublier que la Russie, aux heures tragiques d’août 1914, a fidèlement rempli son devoir d’alliée, que la pression russe a fait retirer du front français des troupes dont l’absence a facilité notre victoire de la Marne, que l’offensive de Broussiloff, en 1916, a soulagé Verdun. Il faut penser aussi aux gros capitaux que nous avons engagés en Russie et que nous ne pourrons récupérer que si ce pays se remet en ordre. Or, il n’y arrivera que par une longue période de paix et par un accord étroit avec ses voisins dont la Pologne est le plus grand et le plus puissant, et dont l’industrie doit jouer un grand rôle dans la renaissance de la vie économique en Russie. La France a le devoir d’aider de toutes manières au rapprochement entre la Pologne et la Russie, non seulement dans l’intérêt des trois nations, mais dans celui de l’humanité