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de l’application de la loi de 8 heures, le taux du fret français augmente dans de telles proportions que notre commerce ne peut plus l’utiliser. »

Les vapeurs qui, avant la loi, avaient six hommes de pont et deux officiers en dehors du capitaine, sont maintenant tenus d’avoir un effectif de neuf hommes et de trois officiers. En outre, le travail du dimanche à la mer est payé au titre d’heures supplémentaires. Sur la plupart des cargos, l’augmentation du personnel a été de 30 pour 100, ce qui représente une dépense additionnelle annuelle de 84 francs par tonne de jauge brute.

Les résultats n’ont pas tardé à se faire sentir dans notre industrie de la pêche maritime. Nous avons vu les comptes d’armement d’une flottille dans laquelle le produit de la vente du poisson suffit tout juste à couvrir les frais de l’équipage, sans laisser un centime à l’armateur. Aussi les pêcheurs anglais apportent-ils leur poisson dans nos ports du Havre, de Dieppe, de Fécamp, de Dunkerque. Celui de la Belgique arrive par camions automobiles dans nos villes du Nord, celui de l’Allemagne et de la Hollande, dans nos régions de l’Est. Nos voiliers désarment les uns après les autres : sur une belle flotte de quatre-mâts qui allait chercher du fret dans les deux Amériques, deux bâtiments seuls naviguent à l’heure actuelle. Les chargeurs étrangers viennent, jusque dans nos ports, faire concurrence aux nôtres. Nos bateaux de 1 500 tonnes sont obligés d’avoir un effectif de pont égal à celui des vapeurs de 6 000 tonnes.

Dans l’ensemble, la surcharge imposée à l’armement français par la loi du 2 août 1919 peut être évaluée à 50 millions de francs par an. Les pertes indirectes atteignent un chiffre supérieur. Les autres nations ont refusé d’imiter la France. La loi de 8 heures n’est pas appliquée par les Anglais, c’est-à-dire la nation dont la flotte marchande dépasse de beaucoup en importance celle de n’importe quel autre pays. La conférence de Gênes, à laquelle un accord international avait été proposé, a échoué devant le refus de la Grande-Bretagne.


IV. — ÉTAT DE LA QUESTION A L’ÉTRANGER

La conférence générale de l’organisation internationale du travail de la Société des Nations, convoquée à Washington par