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et lui donner l’assurance que le changement de ministère ne signifiait pas, dans la politique française, un changement d’orientation, mais seulement un changement de méthode. » Il pourra, termina M. Poincaré, y avoir entre nous des différences, il n’y aura jamais de différend. »

Le 19, le Cabinet, au complet, se présenta devant le Parlement. M. Poincaré lut à la Chambre une déclaration ministérielle concise, ferme, précise, qui a été très bien accueillie. Les attaques des communistes, les calomnies de quelques journaux d’extrême-gauche n’ont fait que souligner la signification d’union sacrée, d’ordre intérieur, de fermeté conciliante, de sécurité nationale et de paix générale qu’apporte avec lui le Cabinet que dirige l’homme qui fut, durant la grande guerre, le Président respecté de la République française.

Ce que contient la déclaration ministérielle de M. Poincaré, il est presque superflu de le commenter pour les lecteurs de la Revue ; ils y ont reconnu les idées que l’éminent chroniqueur a développées ici avec son sens éclairé de tous les intérêts nationaux. Il affirme d’abord les revendications essentielles de la France : « Nous ne pouvons être assurés de sauver les finances françaises que si l’Allemagne, pour le compte de qui nous avons avancé déjà tant de milliards, exécute enfin les engagements qu’elle a pris et répare les dommages qu’elle a causés. » Lorsque nous réclamons notre dû, « une propagande éhontée » s’efforce de dénaturer notre attitude et nos intentions. « On nous représente comme atteints de folie impérialiste et l’on nous accuse de nourrir en secret des desseins suspects. » Cette belle protestation de la conscience française était vraiment nécessaire et a porté loin. Les Allemands ont réussi à persuader à beaucoup d’Anglais, d’Italiens, d’Américains que seules les revendications de la France empêchent la prospérité, universelle de renaître, le commerce de prospérer, l’industrie de trouver des débouchés, le prix de la vie de baisser. Pour ne pas réparer le mal qu’elle a fait, l’Allemagne prétend ameuter l’humanité contre la France. La thèse de M. Lloyd George est : restaurons d’abord la prospérité en Allemagne et en Russie et nous pourrons ensuite exiger de l’Allemagne ce qu’elle doit payer. Pour M. Poincaré, au contraire, l’Allemagne peut payer, car « elle organise sa misère apparente, » en avilissant sa monnaie, mais ses industries et son commerce sont prospères et sa force économique se développe chaque jour. « La condition essentielle d’une réorganisation économique générale est la restauration des provinces dévastées, particulièrement dans les deux pays qui ont été les premiers attaqués par