On se rappelle les campagnes passionnées poursuivies par certains hommes politiques et par quelques brillants écrivains pour l’amélioration du sort de la population indigène d’Algérie et de Tunisie. Ces efforts, parfois peu mesurés, produisirent un effet discutable. A chaque discussion du budget, on assistait aux mêmes joutes oratoires ; on entendait les mêmes critiques sur le régime dit de l’indigénat et sur les pouvoirs de l’administration, celle-ci battue en brèche à la grande joie de ceux qui placent leur espoir dans l’affaiblissement de notre autorité.
En 1912, l’établissement de la conscription indigène avança très naturellement la question et le parti des « jeunes Algériens » prit la chose en mains ; cet impôt du sang devait leur permettre de réclamer des réformes plus politiques qu’utiles, au sens exact du terme. Pendant la guerre, la cause indigène devint sacrée, car on voyait l’admirable courage de nos beaux régiments d’Afrique. Ainsi se détermina le vote de la loi de 1919. Dès le mois de novembre 1915, le chef du Gouvernement, M. Briand, était pressé par M. Georges Leygues, président de la Commission des Affaires extérieures, à la Chambre, et au Sénat par M. Clemenceau, de faire aboutir, sans délai, des réformes jugées urgentes. On se persuadait que la France, pour assurer son empire, ne devait pas recourir aux seules rigueurs de la contrainte ou d’une stricte autorité, mais s’attacher à un régime de sympathie et d’équité qui, loin de mettre en péril la souveraineté de la Métropole, lui assurerait la gratitude confiante des indigènes. En un mot, nous n’entendions conquérir que pour élever et non pour asservir. C’est ainsi que se définissait textuellement le programme inséré dans le rapport de 1918 au Sénat, sur l’accession des indigènes aux droits politiques. Mais de cet apprentissage de l’indigène à la liberté, qui risquerait, si on n’y prenait garde, de s’effectuer au détriment de la France, puisque la mentalité musulmane demeure soumise à l’intransigeance coranique, on n’avait cure. Seuls les députés algériens protestèrent, on les écarta, ils étaient suspects ; dans la Métropole on en était encore à la légende de l’hostilité du colon vis-à-vis de l’Arabe.
J’entends bien que le législateur voulait que la France profitât de la force latente constituée par la population indigène. « Faisant appel, en l’organisant, à cette population, il convient de provoquer ses expansions engourdies et, parle développement