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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 8.djvu/453

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mystère. De ce genre sont la Psi Upsilon, la Sigma Phi qui, d’ailleurs, font partie d’une organisation embrassant les principaux collèges des Etats-Unis. Yale est parmi les Universités américaines celle où ces sociétés secrètes sont le plus nombreuses et le plus florissantes. Elle en a même qui lui sont propres comme les célèbres Skull and Bones, fondée en 1832, et Scroll and Keys, fondée en 1841. Il est difficile d’avoir sur ces confréries des renseignements précis, car nul n’est autorisé à en divulguer les rites. Les associés sont peu nombreux, quinze environ, choisis chaque année parmi les seniors. On n’y est admis qu’après avoir subi des épreuves sur le modèle des initiations de la franc-maçonnerie. Les bâtiments où se tiennent les réunions sont impressionnants avec leurs grands murs sans fenêtres ; ils font songer à quelque cénotaphe égyptien et on les appelle, en effet, des tombeaux. Le choix des membres est l’occasion d’une cérémonie qui s’accompagne elle aussi de démarches mystérieuses. C’est vers le mois de mai que se place le « tap-day, » jour impatiemment attendu par tous les juniors. Dans la soirée, les étudiants s’assemblent sur le Campus et, comme cinq heures sonnent, l’un des anciens se présente. Au milieu de l’attente générale et dans l’incertitude qui étreint tous les cœurs, il se promène silencieux, et quand il rencontre dans la foule un des nouveaux élus, il lui tape sur l’épaule. A ce geste celui-ci apprend qu’il est du nombre des privilégiés. A six heures, le dernier choix doit être signifié. La gloire d’entrer dans une de ces sociétés secrètes est la plus grande distinction que puisse rechercher un étudiant : elle résume toutes les autres. Car l’on tient la main à ce que les sociétaires se, fassent remarquer par une supériorité réelle, que ce soit leur richesse, leur valeur intellectuelle ou leurs succès athlétiques. Quand on fait partie d’une de ces associations, c’est un avantage acquis pour la vie et que l’on porte partout avec soi. Désormais, il existera avec tous les membres plus âgés, et dont la plupart occupent des situations en vue, des liens que rien ne saurait rompre.

Ainsi se crée cet état de camaraderie indestructible qui fait qu’un Yale man, quelle que soit sa condition, sera toujours un ami, presque un frère, pour un autre Yale man, et que tous les Yale men, communiant dans les mêmes souvenirs de jeunesse, entoureront leur université d’affection et de respect, sans jamais oublier. Etre « alumnus » de Yale est un honneur, et un honneur