hypothèses : c’était la bonne qui fut mauvaise. L’influenza m’a tenu trois semaines entre mon lit et mon fauteuil ; elle m’a réduit à un degré de faiblesse et de néant cérébral que je n’aurais jamais imaginé. Et voilà pourquoi votre Revue fut muette le 15 de ce mois. Je suis remis depuis quelques jours, j’ai repris la plume et j’ai dû m’en servir d’abord pour batailler : vous trouverez dans le numéro du 1er ma réponse à M. Aulard, qui m’a trainé sur la claie à la Ligue démocratique des Ecoles. Il a été au Quartier Latin le héraut de la déclaration de guerre que la franc-maçonnerie et le radicalisme m’ont fait l’honneur de m’adresser ; avec quel atticisme, vous en jugerez, si l’on trouve en Avignon la Revue bleue du 22 avril.
Nous avons enterré hier le pauvre Mazade, qui résista moins bien que moi à la maladie régnante. C’est un gros trou à la Revue où sa succession est fort disputée. Je ne parle pas de l’Académie battue à toutes ses brèches par des légions de candidats.
Je regrette que vous teniez la petite plaquette bleue des mains du libraire et non des miennes [1]. Champion ne m’envoya que cette semaine mes exemplaires personnels et je ne croyais pas, d’après ses dires, que la chose eût été déjà mise en vente...
Je suis persécuté par les bons Vivarois : des volumes de correspondance viennent chaque jour me supplier d’accepter une candidature que l’on dit certaine du succès. Je ne me résous pas à boire le calice ; je remets toujours ma décision, espérant qu’ils se lasseront ou qu’il surgira un libérateur. Vous ne sauriez croire avec quelle douleur je vois venir à moi le maudit honneur que tant d’autres briguent.
Et il faut répondre à toutes ces lettres pleines d’un dévouement qui me touche d’autant plus que rien ne l’a justifié de ma part. Je vous quitte pour cette besogne, mon cher ami, et vous serre la main bien cordialement.
Paris, 17 juin 1893.
Mon cher ami.
Vous êtes peut-être avec moi dans Ravenne, à cette heure, et vous félicitez votre ami d’avoir trouvé quelques jours de vrai repos, un peu de replongement dans les seules choses qu’il aime vraiment. Hélas ! il en faut vite déchanter. Au moment où vous à
- ↑ Notes sur le Bas-Vivarais, 1 vol. ; Champion.