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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/107

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entendu dire qu’il ait empêché un suicide. Or, c’est un véritable suicide que l’Empereur est en train de commettre, pour lui-même, pour sa dynastie et pour son peuple.

— Mais que faire ?

— Lutter. La récente intervention des Grands-Ducs a échoué : il faut la recommencer, sur des bases plus larges et, permettez-moi d’ajouter, dans un esprit plus sérieux, moins frondeur, plus politique... Le Conseil de l’Empire et la Douma renferment, tant à droite qu’à gauche, d’excellents éléments pour organiser une résistance aux abus de l’autocratisme. Si tous les hommes raisonnables et patriotes qui siègent dans ces deux assemblées s’unissaient pour une œuvre commune de salut public ; si, avec mesure, avec suite, avec fermeté, ils entreprenaient de démontrer à l’Empereur qu’il mène la Russie à l’abîme ; si la famille impériale se concertait pour tenir un langage identique, en évitant soigneusement toute apparence de cabale et de conjuration ; si l’on réussissait à créer ainsi dans les sphères supérieures de l’État une volonté unanime de redressement national, je crois que les Protopopow, les Dobrowolsky et toute la camarilla de l’Impératrice s’effondreraient vite... Mais qu’on se hâte ! Le péril est pressant ; les heures comptent. Si le salut ne vient pas d’en haut, la révolution se fera par en bas. Et alors, ce sera la catastrophe !

Elle ne me répond que par un geste de découragement. Puis, se rappelant son rôle de cour, où elle est de premier ordre, elle invite quelques dames à s’approcher d’elle...



Lundi, 26 février.

La situation alimentaire en Moldavie s’aggrave chaque jour : l’armée roumaine est rationnée au-dessous du taux d’entretien et la population civile meurt de faim.

D’après le général Berthelot, l’unique solution consisterait dans une offensive au Nord de la Dobroudja, de manière à dégager un bras du Danube et ouvrir ainsi une nouvelle voie d’approvisionnement. Mais le général Gourko se refuse à entreprendre cette offensive qui lui semble des plus dangereuses et qui d’ailleurs ne cadre pas avec ses plans stratégiques.

Le Gouvernement roumain doit mesurer maintenant la faute énorme, qu’il a commise en déclarant la guerre aux Puissances