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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/208

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galerie des glaces, on a fait un buffet, où des laquais en grande livrée servent aux délégués des nations dans une vaisselle royale des pâtisseries, des viandes froides, du vin, du thé, des liqueurs. Partout ailleurs, le service est assuré par des matelots de la marine italienne, qu’on voit accourir au moindre appel, glisser d’un pas élastique à travers les salons, disparaître enfin par des portes qu’on n’avait point devinées. Comme toutes les anciennes demeures italiennes, le Palais-Royal abonde en portes secrètes et en escaliers dérobés. Quelles machinations sournoises, quels complots ténébreux vont s’ourdir dans cette somptueuse boite à surprises ?


LA MAISON DE LA PRESSE

Les journalistes aussi ont à Gênes leur palais : la vénérable Casa Patrone est devenue pour quelques semaines la Casa della Stampa. Que dirait Sophonisbe de Crémone, qui fut, après son mariage avec Horace Lomellini, la maîtresse de cette demeure, que diraient ses sœurs Europe, Anna et Lucie, qui en furent l’ornement, si elles revoyaient les salons que hanta Van Dyck, et où Sarzana peignit l’histoire d’Esther, convertis en bureaux de télégraphe et de téléphone, en office d’information, voire en bar américain ?

La Tour de Babel, dont cette Conférence évoque si souvent l’image, me semble encore plus parfaitement réalisée à la Maison de la Presse qu’au Palais-Royal. Qu’est-ce que les délégués de trente-quatre Gouvernements européens ? Ici ce sont toutes les nations du globe qui se rencontrent, échangent leurs impressions et leurs idées. Les journalistes appartenant aux « Etats refusés, » Turquie, Géorgie, etc.. ne sont pas les moins assidus à Casa Patrone ; les Américains y abondent. Du matin au soir, et presque du soir au matin, c’est une vaste foire aux nouvelles, trop souvent aux nouvelles tendancieuses et fausses. Au cours de cette semaine, il ne s’est point passé de jour, que quelque information perfide ne partît de la Maison de la Presse pour se répandre à travers les délégations. Je dois ajouter, bien à regret, que la plupart des fausses nouvelles ainsi lancées étaient de nature à gêner la politique française, en la faisant apparaître sous un jour défavorable, sinon odieux.