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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/383

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d’ordre et de justice. Dans ses écoles, dans ses hôpitaux, dans ses asiles, la France reçoit indistinctement des Turcs, des Arméniens, des Grecs et des Arabes, des chrétiens de tous les rites, des Juifs et des Musulmans.

De même qu’en Orient les premiers missionnaires français avaient ouvert la voie aux premiers commerçants, ainsi, au cours des siècles suivants, le développement de nos écoles et de nos œuvres d’assistance à travers toute la Turquie a entraîné celui de nos entreprises commerciales, industrielles et financières dans l’Empire ottoman. Le Gouvernement turc confiait à des sociétés françaises le soin de construire des routes et des voies ferrées, d’équiper des ports, de bâtir des quais, d’exploiter des mines ; pour gager des emprunts placés surtout en France, il remettait la gestion de ses revenus les plus importants à l’Administration de la Dette publique, où l’influence française était prépondérante. Une entreprise contrôlée par des Français prenait en régie la culture et la vente du tabac dans tout l’Empire.

A Constantinople et à Smyrne, comme à Beyrouth et à Damas, les grands services municipaux, distribution de l’eau, éclairage, téléphones, transports publics, étaient affermés à des compagnies françaises. Un groupe franco-anglais fondait en 1868 la Banque Impériale Ottomane, qui ne tardait pas à devenir « un rouage essentiel de la Vie financière et économique de la Turquie ; » nos principaux établissements de crédit ouvraient dans le Levant des succursales, ou prenaient des intérêts dans les entreprises ottomanes. Bref, au mois de juillet 1919, les capitaux français engagés en Turquie, soit sous forme de participation aux emprunts d’Etat, soit dans des Sociétés privées, représentaient un total d’environ 3 milliards et demi de francs, et un pourcentage de plus de 60 pour 100 relativement à l’ensemble des capitaux étrangers.

Au point de vue des intérêts matériels, comme à celui de l’influence morale, la France occupait sans conteste la première place dans l’Empire ottoman. Le 14 juillet 1919, les Anglais virent défiler en bon ordre, derrière nos soldats du corps d’occupation, cinq mille enfants élevés dans nos écoles : cinq mille enfants qui parlaient français, qui chantaient la Marseillaise en agitant de petits drapeaux tricolores ! Les fonctionnaires et les officiers britanniques qui assistaient à la revue ne purent dissimuler