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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/437

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Une balustrade de granit très simple enferme une vaste cour, et au delà, adossé à la colline, au milieu de l’escalade des arbres, dominant comme une forteresse tous ces chemins, toutes ces places, et la ville embrumée qui apparaît dans la trouée des arbres, un noir tumulus énorme, formé de gros galets ronds ; c’est sous ce tas fabuleux de pierres que dort Mutsu Hito, divinisé sous le nom de Meiji.

Dans la cour, il y a deux nattes étendues par terre : la plus proche du tombeau pour le Maréchal, ceux qui l’accompagnent ne doivent pas dépasser la seconde. Une longue minute il reste découvert devant l’austère sarcophage de l’Empereur-Dieu.

Dans le même parc, en un site voisin et semblable, sous un pareil amoncellement de galets, l’Impératrice est ensevelie.


VISITE DE KYOTO

Après Kyoto, la monotone ville moderne, c’est une joie de trouver le vieux Japon. L’alignement de toutes les petites maisons de bois, de boutiques pittoresques le long des rues étroites, fait songer à quelque foire immense et joyeuse. Certes, cette ville-là pourrait, comme toutes les villes japonaises, disparaître sans laisser d’autres ruines qu’un tas de cendres : pas une maison de pierres, rien de durable, et cependant, depuis des siècles, sans rien changer des dispositions et des proportions, les Japonais reconstruisent les mêmes demeures fragiles qui ne durent en moyenne qu’une vingtaine d’années. Peut-être cette immutabilité d’aspect et ce sentiment d’éphémère durée donnent-ils à Kyoto ainsi qu’à toutes les villes du Japon épargnées par la contagion de l’Occident leur charme si prenant.

Ainsi le Maréchal a vu le monastère du Nishi Honganji, ses salles aux panneaux d’or patiné, entr’aperçues dans la demi-lumière d’un jour finissant, ses sanctuaires d’ombre et d’or, où les colonnes d’or et de laque éclairent seules le mystère où se cachent des richesses et les dieux étranges ; le Nijo somptueux, sorte de rêve de beauté dorée, l’ancien palais de l’orgueilleux Shogun Tokugawa ; et non loin, symbole de l’humble place que tenait l’Empereur dans son empire, le modeste Gosho, l’ancien palais impérial, pauvre à côté de tant d’éclat.

Et il a vu au pied du Mont Hiei, le Shugakuin, le merveil-