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Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/472

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laisse l’amant d’autrefois, devenu le cavalier servant et le patito. C’est un spectacle qui, lui aussi, contient une morale, et surtout une forte dose de comique.

Le succès de l’interprétation a été pour Mme Grumbach, très drôle, d’une drôlerie d’ailleurs assez grosse, en grande-duchesse ; et pour Mme Marcelle Frappa, qui a été une Camille Engelmann violente et douloureuse. La pièce s’est ainsi trouvée déséquilibrée. Mlle Madeleine Lély, gracieuse comme toujours, et M. André Brûlé ayant laissé passer leurs rôles au second plan.


M. Gémier qui déjà au théâtre Antoine, avait affirmé sa ferveur shakspearienne par de belles représentations de Shylock et de la Mégère apprivoisée, vient de donner à l’Odéon deux adaptations nouvelles des Joyeuses commères de Windsor et du Songe d’une nuit d’été. Le poète Raymond Genty, adaptateur des Joyeuses commères, en a très librement usé avec le dialogue shakspearien, et il est difficile de l’en blâmer, la comédie étant injouable dans son texte intégral. Dans son adaptation du Songe d’une nuit d’été, M. G. de la Fouchardière a procédé de telle sorte que la partie de fantaisie disparaît au seul profit du comique destiné à égayer la foule. Titania, Obéron et Puck lui-même, le lutin ailé, le gracieux « Robin good-fellow, » ne sont plus que des comparses. Ajoutons qu’une simplification de mise en scène, vraiment exagérée, achève d’enlever toute poésie à la féerie shakspearienne.

M. Harry Baur dans le rôle de Bottom, Mlle René Devillers dans celui de Puck, Mlles Paule Andral et Renée Pierny dans ceux de Mrs Page et Mrs Ford, M. Asselin en Falstaff, ont été justement applaudis.


Pour son annuel exercice d’élèves, le Conservatoire nous a offert une représentation du Dépit amoureux, joué en son entier. On sait que la tradition s’est établie de n’en donner que deux actes, ce qui est, de toute évidence, une trahison. M. Jules Truffier, dans sa piété de moliériste, poursuivait depuis longtemps le dessein de mettre un terme à cette profanation. L’exercice de la classe d’ensemble du Conservatoire lui en a fourni l’occasion. La représentation a été charmante. La jeunesse des interprètes convenait à cette œuvre de la jeunesse du poète. Le succès a été complet ; la preuve en est que la Comédie-Française se prépare à jouer le Dépit — en cinq actes !


RENÉ DOUMIC