mais suédoise ; puis, elle est, depuis plus d’un siècle, depuis le règne de la Grande Catherine, au service de la Russie !
Ce qui est exact, c’est que sa famille est originaire de la Poméranie suédoise et qu’elle a fourni une longue lignée de dociles serviteurs à l’autocratisme russe. Il représente donc excellemment cette caste des « barons baltes » qui, depuis le règne d’Anna-Ivanowna, gouvernent la Russie, tous fort dévoués à la personne des souverains, mais communiant peu avec l’âme russe et ayant presque tous des parents au service militaire ou civil de l’Allemagne. L’attachement à la dynastie des Romanow n’est pas seulement chez eux une tradition et une vertu familiale : c’est leur raison d’être.
Aussi, ne suis-je pas surpris du propos ingénu que le comte Fréederickz me tient au dessert :
— La conférence devrait s’entendre pour que, après la guerre, les Alliés se prêtent un mutuel concours, en cas de troubles intérieurs. Nous sommes tous intéressés à combattre la révolution !
Il en est encore à la Sainte-Alliance ; il ne retarde que d’un siècle ! O sancta et senilis simplicitas !
Enfin, le dîner s’achève. On passe dans le salon voisin, où le café est servi.
L’Empereur allume une cigarette et va de groupe en groupe. Lord Milner, Scialoja, Doumergue, le général de Castelnau, lord Revelstoke, le général Ruggieri, le général Wilson, les trois ambassadeurs, ont tour à tour un mot aimable de lui, mais rien de plus, car il ne s’attarde à aucun.
Tandis que ces conversations superficielles se déroulent, l’Impératrice reçoit tour à tour, dans son appartement, les premiers délégués. Elle s’est montrée fort aimable pour Doumergue et lui a dit en terminant : « La Prusse devra être punie. »
Un peu avant dix heures, Nicolas II revient au centre du salon, puis il fait un signe au ministre de la Cour et, de son plus aimable sourire, il prend congé de l’assistance.
Lundi, 5 février.
J’ai à déjeuner Doumergue, le président de la Douma Rodzianko, le président du Conseil de Roumanie Bratiano, plusieurs membres du Conseil de l’Empire dont le comte Alexis