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d’Italie, avait complèté son instruction militaire par une mission accomplie en Europe ; il venait de se distinguer dans les combats de Dolorès et de Tarapaca à la tête d’une division. Il était intelligent, actif et énergique. Sa réponse indignée à la sommation de se rendre montrait toute la décision irrévocable qu’un patriote allait déployer dans la défense d’Arica. Si le temps lui en était donné, il compléterait les fortifications, il dresserait ses volontaires au combat, et la résistance pourrait se prolonger et immobiliser des forces importantes. Le général Baquedano sentit qu’il fallait se hâter.

D’ailleurs, les Chiliens ne disposaient pas d’équipage de siège et seule l’artillerie de l’escadre pouvait contrebattre celle de la place. Dans la journée du 5 juin commença le bombardement de la ville, du port et des fortifications. Mais les bâtiments de l’escadre qui avaient dû se rapprocher éprouvèrent quelques avaries et l’assaut fut décidé pour le surlendemain 7 après une dernière sommation.

Les troupes d’attaque, 4 000 fantassins, prirent leur emplacement en pleine nuit, en laissant à l’arrière leurs feux de bivouac qu’entretenaient les cavaliers pied à terre. Dès la pointe du jour, deux mille hommes éventraient et escaladaient la barricade de sacs à terre qui couvrait le front Sud, pendant que mille autres s’emparaient des forts au Nord ; la résistance se concentrait sur le Morro, d’où une vive fusillade causa quelques pertes aux assaillants ; mais le fort était attaqué par la gorge, son point faible, et il fut rapidement enlevé. Bolognesi, Moore et quelques officiers furent massacrés autour du canon où ils s’étaient groupés. L’explosion de nombreuses mines, provoquée par des ingénieurs inexpérimentés, fit plus de mal aux Péruviens qu’aux Chiliens, mais les assaillants, rendus furieux, ne voulaient plus faire quartier. Plusieurs groupes de soldats péruviens se précipitèrent de la falaise du Morro pour échapper à l’ennemi ; dans la ville, où la réserve et la cavalerie chiliennes avaient repoussé les derniers défenseurs, on constate des massacres et des incendies inutiles. Les vainqueurs firent 1 328 prisonniers, marins et volontaires compris ; donc l’ordre finit par se rétablir et l’humanité par reprendre ses droits.

Mais, d’après les évaluations de l’état-major chilien lui-même, les seules qui valent, puisque tous les Péruviens étaient tués ou pris, la défense eut 800 tués pour 200 blessés, et c’est