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Gouvernement péruvien qui finit par rompre les relations diplomatiques avec le Chili.

A plusieurs reprises, de nouveaux pourparlers intervinrent sans résultat. Le Chili ne voulait admettre le plébiscite que s’il était organisé par ses représentants et sans contrôle étranger ; c’est en vain que le Pérou proposait de revenir au traité de 1898, qui soumettait à l’arbitrage les conditions du plébiscite. Le chancelier don Agustin Edwards écrivait en mars 1910 au ministre des Affaires étrangères du Pérou : « Je dois rappeler à Votre Excellence que les plébiscites enregistrés par l’histoire prouvent qu’il n’y a là que des moyens inventés par les Gouvernements pour obtenir, sous les apparences du suffrage populaire, une cession ou une annexion convenue d’avance, afin d’éviter, autant que possible, de blesser le sentiment national du pays démembré. La raison en est évidente. Les Gouvernements ne sauraient consentir sérieusement à livrer à l’éventualité d’un vote le sort d’un territoire essentiel, comme c’est le cas, à la sécurité des frontières, et nécessaire pour compenser des sacrifices de sang et d’argent. » Cette théorie du plébiscite était au contraire entièrement nouvelle, et dans la pratique on ne peut en retrouver l’application dans aucune des consultations qui, en 1859 et 1866, ont modifié les frontières, selon le vœu unanime des populations, librement exprimé en Savoie et à Nice, comme dans toute la haute Italie.

Quand les expulsions se multiplièrent à Tacna et Arica, donnant lieu à des incidents qui motivèrent la rupture des relations consulaires entre les deux États, le président Wilson essaya d’intervenir, mais son action pacificatrice, accueillie par le Pérou avec gratitude, fut éludée par le Chili. Mais la fin de la guerre mondiale faisait naître la Société des Nations ; les peuples étaient admis à disposer d’eux-mêmes. L’Alsace et la Lorraine redeviennent françaises ; des États nouveaux se créent par la résurrection de nationalités détruites depuis plus d’un siècle, comme la Pologne, ou depuis plus de trois siècles comme la Tchéco-Slovaquie ; la Roumanie doublait son territoire, le Danemark retrouvait le Sleswig, malgré sa neutralité forcée pendant la guerre ; une ère nouvelle semblait commencer, inaugurant la Paix par le droit et la justice. Puisque le pacte qui la créait rendait la société compétente pour toutes les questions « qui affectent la paix du monde, » celle du Pacifique