et la note à payer présentée à la Ville, soit 375 000 francs à verser en argent ou billets de banque. C’est alors que se place la scène de violence au cours de laquelle le receveur municipal fut sommé de livrer les clefs des coffres de sa caisse, puis, devant sa résistance, incarcéré à la Citadelle, tandis que l’on procédait à l’effraction, à l’aide du chalumeau à gaz oxydrique.
Mais les sanctions n’étaient pas toujours exercées contre la Ville ; il est des réquisitions de services dont les victimes ont été prises parmi la population elle-même, dans des circonstances qui ne sauraient être oubliées. C’est l’une des pages les plus tragiques des récits de la guerre, celle qui a soulevé l’horreur du monde civilisé.
Sous le prétexte que l’attitude de l’Angleterre rendait de plus en plus difficile le ravitaillement de la population, et par une véritable représaille, le Grand Quartier Général décida de constituer une main d’œuvre agricole pour cultiver des terres en friche, et c’est un véritable système de déportations en masse qui s’établit, sans distinction d’âge, de sexe et de condition. Des enlèvements nombreux d’hommes, de vieillards, de femmes, de jeunes filles et même d’enfants ont été pratiqués, le plus souvent pendant la nuit, en dehors de toute procédure judiciaire, avec un arbitraire sans appel. L’officier qui opérait dans chaque quartier était le maître absolu et exécutait sa consigne impitoyablement, comme s’il s’agissait de criminels de droit commun. En cas de résistance, voici la sanction : « Emprisonnement jusqu’à trois ans et amende jusqu’à 10 000 marks, ou l’une de ces peines, à moins que les lois en vigueur ne prévoient l’application d’une peine plus sévère. »
Ainsi, sous le couvert de réquisitions de services, ce fut en somme la peine des travaux forcés à laquelle a été soumise une partie de la population lilloise. On ne relira pas sans émotion le récit de ces douloureux événements dans l’article qu’a publié ici même, le Recteur de l’Université, M. Georges Lyon.
Le nombre de personnes ainsi évacuées s’est élevé, pour la seule ville de Lille, à dix mille, prises indifféremment dans toutes les classes de la population. Le départ avait lieu sans que les intéressés eussent connaissance de leur destination, du genre de travaux, du traitement qu’ils auraient à subir. Un certain nombre ont été dirigés à proximité de la ligne de feu, tandis que d’autres étaient transportés dans des régions plus