à remettre de l’ordre dans ses finances ; les mesures que les Puissances alliées pourraient être amenées à prendre pour l’obliger à tenir ses engagements devraient être décidées à l’unanimité.
Deux mobiles se dégagent même d’une si incomplète analyse. Aucun privilège n’est accordé aux réparations ; l’Angleterre a le chômage, « fléau aussi terrible que n’importe quel autre qui a pu s’abattre sur n’importe lequel des pays alliés, » a dit M. Bonar Law aux journalistes américains ; même la priorité belge est supprimée. La nouvelle répartition est toute au bénéfice de l’Angleterre. Tous les Alliés deviendraient solidaires de la dette britannique envers les États-Unis ; la politique anglaise est très préoccupée, surtout depuis le voyage de M. Parmentier en Amérique, d’empêcher que les États-Unis n’adoptent, à l’égard de certains de leurs débiteurs européens, la France par exemple, une attitude plus favorable qu’envers la Grande-Bretagne. Le secrétaire d’État Hughes écrivait dernièrement : « Il n’y a absolument aucun rapport entre les réparations et les dettes de guerre contractées par l’Europe envers les États-Unis. » Cette solidarité que nie le secrétaire d’État américain, le Premier anglais cherche à l’établir. Ses déclarations à la presse américaine, après la première séance de la Conférence, sont significatives. Le projet tend donc d’abord à resserrer la solidarité entre les deux grands Empires anglo-saxons à l’exclusion des autres pays. — En second lieu apparaît l’ambition de l’Angleterre de régler souverainement les réparations, pour tenir à sa discrétion l’Allemagne et la France ; la clause qui exige l’unanimité pour les sanctions à appliquer à l’Allemagne est caractéristique à cet égard. Sur toute l’Europe centrale : Allemagne, Autriche, Hongrie, Bulgarie, Turquie, l’Angleterre, dispensatrice des réparations, étendrait son influence. La France ferait les sacrifices, l’Angleterre aurait les bénéfices. Jamais plus clairement que dans le projet de M. Bonar Law ne s’est affirmée la volonté britannique d’hégémonie politique européenne et mondiale ; il n’existe vraiment qu’un seul peuple à qui convienne, dans son sens propre, le mot d’impérialiste, c’est le peuple anglais ; il est impérialiste à la fois par une conséquence de sa vie économique et par une impulsion profonde et presque inconsciente de sa nature morale. C’est ce qui rend si déconcertante la lecture attentive du plan présenté par M. Bonar Law. « Chaque Anglais est une île, » a dit Emerson.
M. Bonar Law s’est vivement défendu de considérer l’intérêt de l’Allemagne ; il a même dit avec vérité : « Si le reste du monde