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moyens dont il dispose pour que ce discours fût répandu en Angleterre, je crois qu’il produirait un assez bon effet.

La loi sera présentée sans retard au Sénat où elle ne rencontrera pas de plus grandes difficultés qu’à la Chambre. Je pense que le ministre des Finances se hâtera d’envoyer à Paris la personne chargée de la négociation de l’emprunt. Je prendrai la liberté de le munir d’une lettre pour Votre Altesse.

La double élection du colonel Louxe me paraît un événement des plus heureux. Je pense que la France en soutiendra la légalité. Elle n’est nullement contraire à la lettre de la convention de Paris. Le pouvoir étant, dans les Principautés, entre les mains de nos amis et des ennemis de l’Autriche, il devient aisé de procurer aux Hongrois tout ce dont ils ont besoin pour agir, lorsque le moment sera venu.

Les discussions auxquelles cette question donnera lieu détourneront l’attention des affaires d’Italie, et nous permettront de préparer sans bruit notre plan. Le seul mauvais côté de cette affaire, c’est la réunion possible de la conférence et les efforts de l’Angleterre pour porter dans son sein la question italienne. C’est un danger qu’il faut éviter à tout prix. Si l’on doit porter devant les Puissances signataires du traité de Paris la question moldo-valaque, pourquoi ne pas le faire à Constantinople ? Ce serait un moyen de gagner du temps ; on éviterait le danger d’avoir à y traiter les affaires d’Italie ; et l’Empereur pourrait de loin garder une réserve, qui devient bien difficile lorsqu’il est entouré par les plénipotentiaires mêmes chargés de traiter.

Je suis heureux de pouvoir annoncer à Votre Altesse, d’une manière positive, que le mariage qui lui avait été communiqué à Turin, n’est pas fait, et ne se fera probablement jamais. J’ai reçu à cet égard des assurances tellement explicites, que je pense que nous pouvons être sans inquiétudes, si ce n’est pour toujours, pour tout le temps du moins que je resterai dans les conseils de la Couronne [1] . Par des motifs que Votre Altesse appréciera sans doute, j’ose la prier d’agir avec les personnes qui sont le plus intéressées dans cette affaire.

Je prie Votre Altesse d’agréer l’hommage de mon respectueux dévouement.

C. CAVOUR.

  1. Voir ci-dessous la lettre du roi Victor-Emmanuel au prince Napoléon en date du 22 février 1859 relative à ce mariage.