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brillamment développée dans l’exposé des motifs d’une proposition de loi, rédigée par MM. Van Cauwelaert, Franck et Anseele, — proposition qui fut reprise par ses auteurs en 1912, en 1919, puis en février 1922 et dont le texte, atténué par quelques concessions et quelques amendements, fut, ainsi qu’il a été dit, voté par la Chambre des Représentants dans sa séance du 22 décembre 1922. Prévoyant l’objection qui devait leur être faite : « Pourquoi détruire une institution existante et qui rend service ? Pourquoi ne pas créer plutôt une Université nouvelle ou doubler les cours de l’Université de Gand ? » les auteurs de la proposition de loi répondaient :

« Au point de vue flamand, la proposition de créer ailleurs une Université flamande nouvelle ne donne pas satisfaction à ce principe essentiel, qu’une égalité entière doit régner entre les deux langues nationales pour tout ce qui relève des pouvoirs publics. Ce régime maintiendrait entre elles une inégalité évidente, puisque l’Etat aurait deux Universités françaises pour une Université flamande. Pareille solution ne serait pas définitive. « Mais il y a plus : l’Université de Gand est une admirable institution d’enseignement supérieur ; avec ses laboratoires, ses cliniques, ses écoles spéciales, l’esprit et la méthode qui sont en honneur chez elle, elle représente une grande force de civilisation. Les populations flamandes ont souffert et souffrent encore de l’injustice qui a été commise à leur égard du fait que celte puissance intellectuelle est sans effet utile pour leur culture propre et leur langue nationale. Ce n’est que leur accorder une partie de la réparation à laquelle elles ont droit, que de les faire bénéficier de l’acquis représenté par la situation actuelle de l’Alma Mater gantoise ; celle-ci aurait dû, en toute justice, être flamande dès le début ; qu’on ne l’oublie pas. Il faudrait de longues années pour amener une nouvelle Université au même degré de développement et d’influence. A elle seule, l’organisation matérielle prendrait un temps très considérable, et il n’est pas exagéré de dire que plus d’un demi-siècle s’écoulerait avant qu’une nouvelle Université fût, au point de vue du bon fonctionnement, des méthodes, de la cohésion, de l’esprit général, au niveau de l’Université actuelle. Pendant toute cette période, l’infériorité serait marquante. De quel droit infligera-t-on cette situation, ce retard de la justice, aux populations flamandes qui (en ont déjà été trop longtemps privées ? »