L’année 1833 débuta mal ; Balzac, le premier jour de l’an, écrivait à son amie [3] : « Voici plusieurs jours que je manque de courage et que je sens bien vivement les malheurs particuliers de ma vie. Je cède au besoin de m’épancher dans un cœur. J’écrirais, je crois, sur un livre mes pensées, pour les ôter de mon âme qu’elles oppressent. »
Et Balzac se lamente. Le voyage à la Poudrerie recule de jour en jour, rien ne va, les imprimeurs lassent la patience du romancier, sa mère le quitte. La perspective d’une vie solitaire lui est insupportable. Mais quelle femme consentirait à partager sa terrible existence ? « Le hasard, écrit-il, m’a fait connaître le bonheur dans toute son étendue morale, mais en me privant de la beauté sensuelle. Elle [4] m’a donné un amour vrai, qui devait finir. Cela est horrible ! J’ai des orages affreux, dans le secret desquels il n’y a personne. Je n’ai pas de distractions. Rien ne rafraîchit cet embrasement qui s’étend et me dévorera peut-être. Une froideur inouïe succède graduellement à ce que j’ai cru passion chez une femme qui était venue à moi assez noblement. Je tremble de savoir d’où cela vient. Je ne veux pas tirer les déductions logiques que ma science d’observation veut que je voie ; je ferme les yeux comme un enfant. Le mariage serait un repos, mais où trouver une femme ? »
A peine avait-elle reçu cette lettre que, le 5 janvier, Mme Carraud