L’industrie française de l’automobile vient de remporter une grande victoire. Par elle, le désert a été vaincu. Une autochenille Citroën, partie d’Alger, est entrée le 7 janvier à Tombouctou. L’épreuve a été un miracle d’endurance. Mais le voyage lui-même est-il une nouveauté ?
Il y a un siècle, la Société de Géographie de Paris offrait un prix de 10 000 francs à qui percerait les mystères de Tombouctou. René Caillié, en 1828, parvenait au but. Le fait parut si prodigieux que la Société Géographique de Londres refusa d’y adhérer. La Royal Geographical Society était fondée à faire une critique, mais une tout autre que celle-là. La vraie objection, c’est que René Caillié n’était ni le premier Européen, ni le premier Français qui eût atteint Tombouctou. Le 27 mars 1618, le chroniqueur de Tombouctou, — car les grandes villes du Sahara et du Niger avaient des chroniqueurs, — notait l’arrivée de la colonne marocaine du caïd Hamar. Elle avait été guidée à la boussole et au sextant, comme en mer, par un capitaine de marine des Sables-d’Olonne, Paul Imbert, prisonnier des Marocains : ce qui laisse supposer qu’il était renseigné sur la traversée du Sahara par des compatriotes et probablement par des marins.
En 1591, en effet, la colonne d’arquebusiers et de spahis marocains qui avait conquis Tombouctou, comptait soixante-dix escopettiers chrétiens. C’était l’instant où la France occupait au Maroc une situation prépondérante par ses médecins et ses raffineurs : les médecins du chérif devenaient successivement professeurs d’arabe au Collège de France ; et les raffineurs normands