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d’oiseaux au-dessus d’une colline annonçaient le repos d’une délicieuse étape. Les négresses d’Aoudaghost excellaient dans la confection des pâtisseries, des gâteaux à la noix et du macaroni au miel ; elles avaient tant de vogue comme cuisinières qu’on les achetait cent pièces d’or. Les jours de marché, le bruit était assourdissant. Les gens du Maghreb, de Tunis et de Kairouan échangeaient des cuivres et des burnous contre la poudre d’or, l’ambre gris et les boucliers de peau d’antilope des Berbères Nefouças, Louatas, Zénatas et Bercadjennas. Les transactions avaient tant d’ampleur qu’Ibn HaoukaI, au Xe siècle, aperçut entre les mains d’un habitant d’Aoudaghost une reconnaissance d’un négociant de Sidjilmassa, valable pour 40 000 dinars, plus d’un million de valeur intrinsèque !

La capitale de l’Almoravide Abou Bekr n’est plus. Si vous rencontrez quelque part des ruines protégées du côté du Sud par une colline couverte de gommiers, c’est là que fut Aoudaghost. Mais ne demandez aux géographes arabes aucune précision. L’un en fixera l’emplacement à 6° de latitude, un autre à 26°. Tel d’entre eux la croit à l’Est de la piste qui allait de Sidjilmassa à Ghana, du côté de Tombouctou. Tel autre la place à l’Ouest du Sahara, non loin du pays des nègres et de l’Océan. Et c’est à cette hypothèse que je me rallie. Deux coordonnées, — la route suivie par les caravanes à travers l’Adrar mauritanien, et la coopération des Toucouleurs Sénégalais avec les troupes de l’Almoravide, — tendent à situer Aoudaghost en bordure du Tagant, entre Kiffa et Tichit.

Le trait essentiel du commerce saharien, c’est l’échange du sel que la nature a distribué avec prodigalité au Nord de l’Afrique, contre l’or qu’elle a déposé avec générosité dans le Sud du Sahara. Cette loi dicta dès une haute antiquité les routes des caravanes, des salines d’Arguin vers Ghana, des salines du Bornou vers les peuplades de la boucle du Niger, des salines de Teghàzza vers Tombouctou : situation économique dont un texte arabe de l’an 1048 expose parfaitement le mécanisme.

L’ampleur de ce trafic n’avait point échappé à Malfant. Mais s’il disait que l’article fondamental était « le sel en dalles, en barres ou en pains, » il ne nommait point le lieu de production, une localité où « les maisons construites en sel en guise de roseaux auraient fondu, s’il avait fait de la pluie, » malgré leurs toits en peaux de chameau. C’était Teghâzza, que Taodéni,