britannique y joue son rôle ; le Manchester Guardian propose de recourir à la Société des Nations. Visiblement, l’Angleterre appréhende que la France ne prenne, avec l’Italie et la Belgique, la direction d’une politique continentale.
Le Sénat des États-Unis a voté à une forte majorité une motion invitant le Président à retirer ses troupes d’Allemagne. La garnison américaine a en effet quitté Coblentz le 25 et le drapeau étoilé, salué par les soldats français, a été amené. Depuis longtemps, ce retrait était résolu ; mais les circonstances permettent aux Allemands de représenter ce départ comme une désapprobation de la politique française. Un jour viendra où les Américains regretteront les temps glorieux où ils combattaient à nos côtés pour un noble idéal ; pour le moment ils paraissent oublier que, si les choses en sont venues où ils les voient, c’est à eux, pour une large part, qu’en incombe la responsabilité.
Le Gouvernement italien, sans joindre ses troupes aux nôtres, a envoyé dans la Ruhr ses ingénieurs. M. Mussolini a trop le sentiment des intérêts et de la dignité de son pays pour le tenir à l’écart d’une crise d’où peut sortir, avec le règlement définitif de la paix, une nouvelle politique européenne ; son attitude actuelle est aussi habile qu’elle est, pour le moment, favorable à notre action.
Si l’Allemagne, dans ses efforts pour provoquer dans la Ruhr des troubles graves en lassant la patience des soldats français, n’aboutit qu’à une déception, si elle n’arrive pas à gagner cette bataille d’opinion à laquelle elle sacrifie tout, et dont le succès lui permettrait de déchirer les traités, il lui reste l’espoir de susciter, en Europe centrale et orientale, des troubles, des conflits, qui amèneraient la République des Soviets russes à mettre en pratique le traité de Rapallo. Entre l’Allemagne et la Russie, et aussi dans le bassin du Danube et dans les Balkans, les frontières ne sont pas encore bien consolidées, les États nouveaux ou agrandis n’ont pas encore fortement constitué leur armature militaire, leur organisation administrative et financière ; et il ne manque pas, çà et là, de minorités turbulentes et d’États déchus qui n’acceptent qu’à contre-cœur les limites nouvelles où les enferment les traités. L’Allemagne mène le chœur de ces mécontents ; sa diplomatie officielle et ses agents secrets attisent les rancunes, entretiennent les irrédentismes ; dans ces régions, ou les armes des Alliés ne peuvent faire sentir rapidement leur poids, les Stinnes et les Cuno ont le moyen de susciter des troubles qui pourraient aller jusqu’à la guerre ; ils y trouveraient un double bénéfice :