Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 13.djvu/799

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trop bien du reste pour croire que je puisse porter, dans la conciliation de ces antinomies suprêmes, un attachement exclusif à telle ou telle formule. Mais il me semble que le oui et le non absolus y sont également inapplicables.

Croyez, cher maître et confrère, à mon plus haut et plus vif attachement.

E. RENAN[1].


Sainte-Beuve a répondu le 26 mai : « Cher confrère, disait-il, je ne vous ai pas remercié de cette dernière lettre écrite au moment du départ, et qui complétait ce bon et charmant entretien. Je voudrais être un bon secrétaire… Ce qu’il faudrait faire sur vous, ce serait un dialogue à la manière de Platon : mais qui le ferait ? » — Il a utilisé et même cité plusieurs passages de la lettre de Renan dans ses deux articles des Nouveaux Lundis[2].


Paris, 4 novembre 1862.

Cher et illustre maître,

Baudry[3] m’apprend que vous avez désiré une note sur ses travaux philologiques. Sans être un spécialiste rigoureusement classé, Baudry est bien au cœur de tous les travaux de philologie et de mythologie comparées. Ses travaux sur les légendes de Grimm et sur les Mythes du feu de Kuhn, comptent parmi ce que nous avons de mieux en France, sur l’importante branche d’études qui a démontré en ces dernières années que les peuples indo-européens ont eu à l’origine un même système de mythes, comme ils ont eu une même langue. Sur ce terrain-là, Baudry est maître et au courant du dernier mot. Il s’est aussi fort occupé de droit primitif comparé, science qui amènera probablement au même résultat que la philologie et la mythologie comparées ; mais il a jusqu’ici publié peu de chose sur ce sujet. Il paraît savoir beaucoup de sanscrit, et en a rédigé un manuel grammatical. Mais, je le répète, sa maîtrise est beaucoup plus dans les investigations analytiques comparées. Là, je ne lui trouve point d’égal parmi nous.

  1. Note au crayon d’une autre écriture : « Voir la fin de la Préface de Job, 11, en bas. »
  2. Voyez notamment Nouveaux Lundis, t. II, p. 397-398 ; 405-406. Les deux articles sont du 2 et du 29 juin 1862.
  3. Frédéric Baudry, philologue et littérateur, né à Rouen le 25 juillet 1818, mort à Paris le 2 janvier 1885.