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et nous voilà associés à ses difficultés, que nous l’admirons de si bien surmonter. Nous prenons une idée de tout le génie d’organisation et de volonté que la France religieuse dépense pour couvrir de ses écoles le monde…

Et puis, quelle leçon pour chacun de nous, s’il peut entrevoir quelque chose de la modestie de ces créateurs d’œuvres ! En causant avec ces messieurs, je crois distinguer qu’ils sont soutenus par leur fierté d’être prêtres-missionnaires et d’être Français, et je crois aussi qu’ils tirent un certain contentement intérieur d’être autorisés. C’est Napoléon Ier qui les a reconnus. Sauf erreur, parmi les congrégations masculines, il n’y a qu’eux et les Missions étrangères de la rue du Bac qui aient devant l’État leur situation en règle. Ils sont légaux. Peut-être que je me trompe, mais personne ne prendra en mauvaise part mon interprétation, je crois distinguer qu’ils en éprouvent le sentiment de tenir de plus près au gros de la nation, au vieux tronc séculaire.

Quel milieu plein d’honneur, que ces congrégations françaises ! J’en respire l’atmosphère salubre, et cependant la beauté du Liban me distrait. J’écoute ces messieurs, et je regarde le jour descendre sur le paysage sublime ! Quel contraste d’une telle nature voluptueuse et misérable, et de la sagesse occidentale que nos religieux y distribuent !

— Monsieur Sarloutte, voilà des jours et des jours que je parcours les sentiers du Liban, à chaque heure arrêté par des Maronites qui sont élèves de nos écoles ou qui réclament des écoles. Eh bien ! je voudrais, une fois pour toutes, apprendre de vous comment s’alimentent ces fontaines de civilisation !

— Les écoles communales, dans les villages de la Montagne, me dit M. Sarloutte, ah ! c’est encore une œuvre bien intéressante, que les diverses congrégations se partagent et qui pèse, pour une part, sur notre mission provinciale de Beyrouth. Comment on les entretient, ces petites écoles, si précieuses, vous no me croirez pas ! On donne à un brave homme un franc par jour, pour réunir les enfants du village et leur apprendre à lire, à écrire, à compter dans leur langue arabe. Si le maître peut donner une vague teinte de français, nous portons le traitement au chiffre fastueux de 1 fr. 60 par jour ! Nous autres, lazaristes de Beyrouth, nous avons ainsi fondé cent quarante-neuf écoles qui abritent 7 338 enfants. Et comment notre maison provinciale