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famulaires qui passent volontiers dans la vie en s’inclinant, » Gazier tira de ses archives des lettres de Lancelot et prouva que, pour avoir été sacristain et professeur de grec, cet honnête homme ne s’en était pas moins montré à certains jours plein d’énergie, presque un héros. — Des admirateurs de Port-Royal avaient traité dédaigneusement les jansénistes du XVIIIe siècle et prétendu que l’esprit des grands solitaires et des grandes religieuses n’avait point survécu à la destruction de l’abbaye : en guise de réplique, il conta la touchante histoire des frères Tabourin qui, en plein XVIIIe siècle, ouvrirent des écoles chrétiennes pour les petits enfants du faubourg Saint-Antoine, puis il se fit l’historiographe des Hospitalières du faubourg Saint-Marcel qui, n’ayant point voulu accepter la bulle Unigenitus, furent persécutées par l’impitoyable archevêque Christophe de Beaumont du Repaire, et il exhuma les lettres vives et charmantes d’une de ces religieuses, Jeanne de Boisgnorel, en qui revivaient les vertus de Port-Royal : même probité de conscience, même opiniâtreté douce et tenace à vivre et à mourir dans son scrupule. — Une légende voulait que le Christ « aux bras étroits » fût une invention janséniste : il accumula textes et estampes pour montrer que les diverses représentations du Christ en croix n’ont rien à voir avec la théologie. Avec une dévotion propre à réjouir les amateurs d’iconographie, mais qui eût un peu surpris M. Hamon, il rassembla et publia tous les portraits connus des « messieurs, » des religieuses et des « amis du dehors. » — Cependant trois grands écrivains du XVIIe siècle lui paraissaient les plus sûres cautions de Port-Royal devant la postérité : Racine, Bossuet et Pascal. Il ne pouvait souffrir que leur gloire ne fût pas liée à celle des « amis de la vérité. » Il voulut donc que le deux centième anniversaire de la mort de Racine fût célébré à Port-Royal même, mais il fit mieux, il nous donna une excellente édition de l’admirable Abrégé de l’Histoire de Port-Royal et compléta l’ouvrage inachevé de Racine en y joignant un abrégé chronologique, des notes, des éclaircissements, un essai bibliographique, si bien que ce petit livre est devenu un parfait manuel. Assurément Bossuet n’était pas janséniste, mais il était augustinien, gallican, et n’aimait pas les jésuites, — qui le lui ont bien rendu : pour ces trois raisons Gazier le chérissait autant qu’il détestait Fénelon ; aussi n’a-t-il rien écrit de