champ de blé, les fleurettes qui rendent plus léger un exposé difficile. De cet exposé M. Fichot s’est tiré admirablement, et je serai le dernier à les lui reprocher.
Le rythme murmurant du flux et du jusant qui soulève vers les cieux la mer étincelante, puis la laisse retomber, comme épuisée de son effort éternel, a longtemps paru un mystère insondable. Un ancien appelait les marées le tombeau de la curiosité humaine. Pourtant on trouve déjà dans de très vieux livres des explications dont la poésie ou l’imprévu fait presque pardonner l’absurdité. Pour les anciens Chinois, la mer étant le sang de la Terre, les marées n’étaient que le battement de son pouls. Rien de plus simple comme on voit. Un des premiers qui aient eu l’intuition de l’origine astrale des marées est peut-être certain auteur oriental du XVIIIe siècle. Il s’appelait, si je me souviens bien, Zakariyya Ibn Muhammad Ibn Mahmud Al Qazvini. Pour lui, l’élévation périodique des mers est due au soleil dont la chaleur dilate les eaux et les oblige à occuper un volume plus grand qu’en son absence. C’était faux, mais fort ingénieux, et cela contenait plus d’esprit scientifique qu’on n’en eût pu trouver alors dans toute l’Europe.
Il a fallu attendre Newton puis Laplace et Poincaré, pour comprendre que la cause principale des marées réside dans la lune et pour rendre compte des singularités du phénomène.
Dans sa lumineuse introduction synthétique, M. Fichot nous rappelle cependant que, dès le premier siècle avant Jésus-Christ, le philosophe stoïcien Posidonius, dont Cicéron suivit les leçons à Rhodes, nous a laissé un tableau exact des concordances qu’il avait observées sur la côte d’Espagne entre les variations diverses, mensuelles et même annuelles, des marées et les mouvements de la lune et du soleil. Le fil conducteur était trouvé.
En fait, le problème n’a pas beaucoup préoccupé les anciens Grecs, curieux de tout pourtant. C’est que,— nous verrons pourquoi tout à l’heure, — la Méditerranée n’a guère de marées notables. Aussi l’Odyssée ne parle pas des marées, bien qu’elle nous initie sans omettre un détail à tout ce qui concerne la navigation dans les mers helléniques.
Galilée lui-même s’est trompé au sujet des marées. Pour lui la lune n’y est pour rien. Cette négation dans la bouche du grand Italien provenait évidemment de sa répugnance à l’égard de toutes les idées scolastiques, répugnance poussée jusqu’à l’excès,.., qui en tout est un défaut.