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George n’aura pas trop pour aboutir de toute sa souplesse et de sa fertilité de ressources. D’une part, les Orangistes de l’Ulster chercheront à faire échouer des pourparlers où ils sentent une menace pour ce qu’ils appellent leurs libertés, c’est-à-dire leurs privilèges. Ce n’est pas par esprit de sacrifice qu’ils ont accepté naguère, des mains de M. Lloyd George, le home rule organisé pour leurs six petits comtés par le Government of Ireland Act de 1920, mais comme une arme défensive, — et offensive au besoin, — contre l’Irlande nationale, et un sûr moyen d’empêcher l’unité et l’indépendance irlandaise. A ce home rule local, ils se tiennent comme à leur charte définitive : ils refuseront donc de participer aux négociations entre Londres et Dublin, et s’efforceront de brouiller les cartes en jouant adroitement de l’atout que leur a si imprudemment donné M. Lloyd George et qui maintenant se retourne contre lui-même. D’autre part, ce qui est plus grave, c’est qu’entre lui et les dirigeants de l’Irlande nationale, les thèses posées sont diamétralement opposées, les points de départ et les points de vue sont en contradiction absolue. M. Lloyd George part du Government of Ireland Act de 1920, qui a offert un semblant d’autonomie à chacune des deux parties en quoi il a divisé l’Irlande, à l’Irlande nationale (qui n’a pas voulu d’un cadeau trompeur et d’une loi de division) comme aux six comtés du Nord-Est ; il est disposé à élargir cette loi, mais sans sortir de son esprit, c’est-à-dire du partage de l’Irlande en deux Irlandes, et sans sortir non plus de l’Empire et de la souveraineté de la couronne. Pour les maîtres actuels d’Erin, au contraire, il n’y a qu’une Irlande, au nom de qui M. de Valera prétend parler seul, l’Ulster orangiste n’étant séparé du reste du pays que par l’artifice d’une loi anglaise, c’est-à-dire étrangère, nulle et non avenue aux yeux des Irlandais. Et cette Irlande unique est une nation indépendante et souveraine, en dépit de l’Acte d’Union de 1800, parce que les droits d’une nation sont imprescriptibles, et parce qu’en fait la déclaration solennelle de cette indépendance a été formellement faite par la Dail à Dublin le 21 janvier 1919. Les Anglais ne sont en Irlande que des étrangers sans titre, des oppresseurs sans droit : ils n’ont qu’à s’en aller. Il n’y a pas de question d’Irlande, il n’y a qu’une question de l’occupation illégale et de l’évacuation nécessaire de l’Irlande par les Anglais.

Ajoutez que, chez les Extrémistes, la doctrine et l’idéologie