— Je vous remercie, Mlle Nicole. Gardez-le, gardez-le précieusement, et même épousez-le si le cœur vous en dit : moi, décidément, je lui préfère votre père.
— Ah ! prenez garde, miss Maud. Ce que vous faites est mal.
— Vous me menacez ?
— Ce n’est pas moi qui vous menace. Prenez garde au sort d’une princesse Olga.
— D’une princesse Olga ?
— Oui, d’une princesse Olga qui vous a précédée, et qu’on renvoie.
— Ah ! non, moi, on ne me renvoie pas. On me déplaît ou l’on me plait. Et, si je le veux, on m’épouse.
— Pour vous épouser, il faut être libre.
— On le devient.
— On le devient : vous êtes folle, miss Maud, je crois.
— Je ne suis pas folle, Mlle Nicole, je vous jure.
— Alors vous rêvez.
— Une femme de sport ne rêve jamais.
— Est-ce moi qui rêve, miss Maud ? Vous en a-t-il parlé ? a-t-il osé vous en parler ?
— Sans doute, puisqu’il continue à me faire la cour.
— Ah ! mon Dieu !
— Eh bien ! quoi, vous n’allez pas vous évanouir ! Voilà bien les Françaises ! Qu’y a-t-il là de si étonnant ? Vous avez un père charmant : il lui faut une jeune femme. Est-il, dans votre monde, le premier homme qui ait divorcé pour se remarier ?
Les voix se turent. Nicole Deleuze devait pleurer, et l’Anglaise s’impatienter. Puis brusquement, Nicole, d’une voix raffermie et même durcie, de la voix de commandement qui, sur le bob, avait ordonné de ne pas freiner, reprit l’entretien :
— Miss Maud, écoutez-moi bien. Ma mère est malade, et je la remplace. Vous voulez la guerre : vous l’aurez. Vous avez pu vous apercevoir que je n’ai pas accoutumé d’être battue, ni au bob, ni au bal. C’est déjà bien assez de subir les pauvres princesses Olga. Ou vous renoncerez à votre abominable projet, — et ce n’est tout de même pas encore l’habitude chez nous de se fiancer à un homme marié, — ou je vous exécuterai tout à l’heure, dans la salle de danse, publiquement.
— Vous m’exécuterez ? Je veux voir ça.
— Vous le verrez, je vous en avertis. Je vous rendrai