allemands profitent de ce sentiment très noble. Ils viennent par fournées, sans attendre qu’on les invite. A Lund, me disait M. Pinot, il n’y a guère de jour sans conférence allemande. Récemment, Harnack faisait quatre conférences ; bientôt, Willamovitz en fera cinq. Ils demandent à venir et aucun argument ne leur coûte. La raison invoquée par Villamovitz, par exemple, c’est qu’il n’a pas de bois pour se chauffer. On aurait pu lui conseiller de s’adresser à Stinnes ! Nous aussi, en France, nous avons des savants qui mènent une vie misérable, mais en Suède on nous croit riches. On ne soupçonne pas le bouleversement apporté dans la vie des classes moyennes et des travailleurs intellectuels par la guerre et l’après-guerre ; et si les Suédois connaissaient cet état, s’ils connaissaient la misère de nos populations du Nord, et l’effort de reconstitution qu’elles ont fait, — au prix de quels efforts et avec l’argent de la France ! — leurs appréciations se modifieraient en notre faveur ; mais ils ne savent pas !...
Il faut qu’ils apprennent à nous connaître, et il faut aussi que nous les connaissions. La meilleure contre-propagande, c’est le resserrement des liens spirituels, sans préjudice des liens économiques. A cet égard, notre ministre à Stockholm, M. Delavaud, a fait des miracles pour ramener vers nous les sympathies et pour éclairer l’opinion. Il a visité toutes les Universités suédoises ; il a fait envoyer gracieusement des livres français à leurs bibliothèques ; il a contribué à mettre en lumière les talents suédois, les œuvres suédoises ; à faire conférer à plusieurs maîtres éminents des grades dans la Légion d’honneur, et à un savant célèbre la qualité très enviée de correspondant de l’Institut de France.
Car nous avons, malgré tout, des amis en Suède. On peut citer, au premier rang, Branting, Palmstjerna, le grand astronome Hildebrandson, Arrhénius, Mittag-Leffter, — tous trois correspondants de notre Académie des Sciences, — Et les Français qui ont voyagé dans les villes universitaires de Suède, savent ce que doit notre cause à des hommes comme le professeur Staaf, d’Upsal, et le professeur Vising, de Gothembourg.
Les Suédois se plaignent d’être ignorés, chez nous. Attirons-les, recevons-les. Offrons à leurs savants, non pas seulement des banquets, mais des facilités de travail. On m’a raconté qu’un professeur suédois, étant venu en France, pour étudier nos